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Le samedi 15 juin 1940.

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Message  roger15 15/6/2008, 15:18

Le samedi 15 juin 1940.

Bonjour à toutes et bonjour à tous, Smile

Il y a 68 ans aujourd'hui, le samedi 15 juin 1940, la France subissait les pires journées de son histoire !… Jamais l'avenir de notre pays n'avait semblé plus sombre ; d'ailleurs depuis quelques jours les nouvelles ne cessaient pas d'être de plus en plus alarmantes :

* le lundi 10 juin 1940 à 19h30 le Président du Conseil, Paul Reynaud, fait à la TSF, depuis Paris, le point sur le premier mois de l'attaque allemande (le vendredi 10 mai 1940) :

«
Nous sommes au sixième jour de la plus grande bataille de l'Histoire [Paul Reynaud évoque "la bataille de France" qui a commencé le mercredi 5 juin 1940, après la fin de "la bataille du Nord" du vendredi 10 mai au mardi 4 juin 1940]. L'incendie a commencé sur la Somme, il s'est propagé jusqu'à la Meuse… Rien ne pourra diminuer notre volonté de lutter pour notre terre et pour nos libertés.

Les épreuves qui nous attendent sont dures, nous y sommes prêts, nos têtes ne se courberont pas.

C'est l'heure que choisit Monsieur Mussolini pour nous déclarer la guerre. Comment juger cet acte ? La France n'a rien à dire. Le monde qui nous regarde jugera.

Interrogé, cet après-midi par notre ambassadeur, Monsieur François-Poncet, sur le prétexte de cette déclaration de guerre, le comte Ciano
[ministre italien des Affaires Étrangères et gendre de Benito Mussolini]
a répondu que Monsieur Mussolini ne fait qu'exécuter les engagements qu'il a pris avec Monsieur Hitler.

La France entre dans cette guerre, avec la conscience pure et pour elle, ce n'est pas un vain mot. Le monde connaîtra peut-être bientôt que les forces morales sont aussi des forces.

Au cours de sa longue et glorieuse Histoire, la France a traversé de plus rudes épreuves. C'est alors qu'elle a toujours étonné le monde. La France ne peut pas mourir.
»

Trois heures plus tard, vers 22h30, le Président du Conseil; les ministres, les Députés et les Sénateurs encore présents à Paris, le général Maxime Weygand et son État-Major, commencent à quitter discrètement Paris..

A 23 heures, ce lundi 10 juin 1940, la TSF diffuse un très bref communiqué officiel de la Présidence du Conseil qui révèle au peuple français que la situation est encore plus grave que prévu :

«
Le gouvernement est obligé de quitter la capitale pour des raisons militaires impérieuses. Le Président du Conseil se rend aux Armées.» Cette annonce est précédée et suivie par le nouvel indicatif de la radiodiffusion française : les mesures de la Marseillaise "Aux armes citoyens".

A minuit tous les convois ministériels ont quitté discrètement Paris, tous feux éteints, par la porte de Châtillon… Paul Reynaud, avec dans sa voiture un certain Charles de Gaulle, quitte Paris à minuit précise, via Chartres (Eure-et-Loir) elle arrive à Orléans (Loiret) au lever du jour le mardi 11 juin 1940, après un voyage lent et pénible sur des routes qui commencent à être encombrées de réfugiés fuyant l'avance allemande.

En apprenant le départ des pouvoirs publics de Paris, de nombreuses personnes commencent à quitter elles aussi la capitale et vont définitivement encombrer les routes jusqu'à la fin des combats, le lundi 24 juin 1940.

* le mardi 11 juin 1940 : les pouvoirs publics français s'installent temporairement à Tours (Indre-et-Loire) et dans les environs.

A 19h30 a lieu au château du Muguet à Briare (Loiret) un Conseil des ministres franco-britannique.

Lors de ce conseil, un échange particulièrement significatif oppose Paul Reynaud et Maxime Weygand à Winston Churchill :

Paul Reynaud déclare que les escadrilles britanniques auraient un rendement très supérieur si elles étaient enfin stationnées en France. Le général Weygand supplie le Premier ministre britannique d'envoyer tous les avions de chasse anglais, jusqu'au dernier, sur des aérodromes français pour "participer à la bataille qui scellera le sort des deux nations".

Winston Churchill répond en rugissant : «
Non ! Ce n'est pas vrai ! Il y a un horizon plus vaste, un champ de bataille plus large à considérer ! Aujourd'hui c'est la bataille de France ; demain ce sera la bataille d'Angleterre ; tout ce qui sera perdu aujourd'hui peut être regagné demain. »

Le Conseil des ministres franco-britannique prend fin à 21h30. C'est à cette occasion que Winston Churchill a fait la connaissance du général de Gaulle.


* le mercredi 12 juin 1940 : l'avion de Winston Churchill s'envole de l'aérodrome de Briare à 10h30 pour l'Angleterre, escorté par ses douze Hurricanes. Il reviendra en France dès le lendemain.

* le jeudi 13 juin 1940 : dans l'après-midi le Gouverneur militaire de Paris, le général Héring, fait placarder sur les murs de la capitale l'affiche suivante : «
Le général Héring, appelé au commandement d'une armée, remet le gouvernement militaire entre les mains du général Dentz. Paris est déclaré ville ouverte. Toutes mesures ont été prises pour assurer, en toutes circonstances, la sécurité et le ravitaillement des habitants. » Dans l'après-midi du jeudi 13 juin 1940 les troupes allemandes arrivent à la lisière de Paris : à Aubervilliers et à Pantin.

A 13 heures Winston Churchill atterrit sur l'aérodrome de Tours (Indre-et-Loire). Il n'est accueilli par personne, ce qui le met en rage !… Paul Reynaud, retenu au château de Chissay, a bien envoyé Paul Baudouin, ministre français des Affaires étrangères pour accueillir le Premier Ministre britannique sur l'aérodrome de Tours, mais il a hélas été fortement retardé par une panne de voiture… Winston Churchill et sa suite déjeunent (fort mal paraît-il…) au
Grand Hôtel de Tours. Paul Baudouin le rejoint au milieu du repas. Après le déjeuner, Paul Baudouin conduit Churchill et sa suite non au château de Cangé (où l'attendent le Président de la République Albert Lebrun, les ministres et le général Weygand) mais à la préfecture d'Indre-et-Loire où s'est installé provisoirement Georges Mandel, le Ministre de l'Intérieur. Dans ses Mémoires Churchill l'a ainsi décrit : « Cet ancien et fidèle secrétaire de Clemenceau semblait être dans les meilleures dispositions d'esprit. C'était l'énergie et le défi personnifiés. L'appétissant poulet qu'on lui avait servi pour déjeuner était toujours devant lui, intact sur le plateau. Mandel était comme un rayon de soleil. Un téléphone dans chaque main, il ne cessait de donner des ordres, de prendre, de prendre des décisions.» Paul Reynaud arrive alors à la préfecture de Tours. A 15h30 commence une conférence franco-britannique" avec Paul Reynaud et Paul Baudouin comme seuls représentants des ministres français (depuis 15 heures, Albert Lebrun, les autres ministres et le général Weygand attendent Churchill et Reynaud au château de Gangé). La conférence prend fin à 17h20, il déclare en sortant de la pièce en voyant le général de Gaulle : « Ah ! voici le connétable de France… ». Il s'envole peu après de l'aérodrome de Tours, sans même avoir été informé par qui que ce soit qu'on l'attendait au château de Cangé pour un Conseil des ministres franco-britannique… Churchill ne remettra les pieds sur le sol français qu'en juin 1944… Paul Reynaud, accompagné de Paul Baudouin et de Georges Mandel arrive enfin au château de Cangé à 18 heures, où le président de la République, les ministres, et le général Weygand l'attendent depuis trois heures !!!… Ils sont tous très furieux d'apprendre que Churchill est déjà reparti sans les rencontrer… Et en plus Paul Reynaud fait un compte rendu très tronqué de sa rencontre avec les ministres anglais…

* le vendredi 14 juin 1940 : aux premières heures du jour, les régiments de la XVIIIème armée allemande (von Kuchler) font leur entrée dans Paris… Elles défilent rapidement sur les Champs Elysées…

Dans l'après-midi le gouvernement français quitte Tours pour Bordeaux, via Parthenay, Saint-Maixent, Saint-Jean-d'Angély et Saintes, par des routes très encombrées par des civils qui fuient l'avance allemande… C'est en début de soirée que le gouvernement s'installe à Bordeaux.

* le samedi 15 juin 1940 : à 16 heures se réunit, sous la présidence d'Albert Lebrun, le premier Conseil des ministres à la préfecture de Bordeaux. L'affrontement entre les partisans de l'Armistice (avec à leur tête le Maréchal Pétain et Camille Chautemps) et ceux de la lutte à outrance devient de plus en plus vif…

Paul Reynaud déclarera cinq ans plus tard lors du procès du Maréchal Pétain à propos de ce Conseil des ministres : «
Mon impression fut telle que je pris une feuille de papier que je divisais en deux par la hauteur. J'inscrivis à droite les noms de ceux qui parlaient pour la proposition Chautemps [demander aux Allemands quelles seraient les conditions d'un armistice] et, à gauche, ceux qui parlaient dans mon sens. Il y avait treize noms à droite pour la proposition Chautemps, et six à gauche pour la mienne ».

Alors Paul Reynaud se tourne vers le Président de la République, Albert Lebrun : «
Il ne me reste qu'à vous donner la démission de mon gouvernement ». Albert Lebrun refuse, et finalement Paul Reynaud accepte de ne pas encore démissionner…

Ce conseil des ministres prend fin à 19h55. Paul Reynaud, sitôt sorti de la salle où se tenait le Conseil s'adresse au général Weygand et lui ordonne de demander la CAPITULATION DE L'ARMÉE FRANÇAISE !!!… Le général Weygand refuse en lui répondant sèchement qu'il se refusera toujours à signer la capitulation de l'armée française. C'est au gouvernement, qui a déclaré la guerre de prendre ses responsabilités et de demander l'armistice !…

Entre temps, à 16h30 le général de Gaulle a quitté Brest à bord du contre-torpilleur Milan, mis à sa disposition par la marine nationale française. Le Milan accoste à Plymouth à 22 heures. Le général de Gaulle monte dans la voiture qui l'attend et qui arrivera à Londres le dimanche 16 juin 1940 au lever du jour.

Ce dimanche 16 juin 1940 verra pas moins de trois Conseils des ministres se tenir à la préfecture de la Gironde. Peu à peu Paul Reynaud va perdre pied face aux partisans de l'Armistice et finalement jeter l'éponge dans la soirée. Cette journée sera sans doute la plus dramatique de toute l'histoire de la France. Si cela vous intéresse, et si ce que j'ai écrit aujourd'hui vous a intéressé, je pourrais éventuellement vous la raconter…

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Message  PLV 15/6/2008, 16:02

Une note d'humour pour saluer la présentation de cette sombre semaine par roger: vers 7h le 14 juin les premiers motocyclistes allemands entraient dans Paris, à 12h Speidel et toute la bande déjeunaient déjà au Ritz...

Ils ont des bons réflexes les Teutons...

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Message  Catalina 15/6/2008, 18:47

Il manque pas mal d'éléments importants:
- le 13 juin:

Lors de l'entrevue Reynaud-Churchill à Tours, ce dernier indique qu'il n'aura aucune récrimination à une demande d'armistice par la France. Un accord que Churchill confirmera peu aprés la levée de la séance avec pour seule condition qu'un dernier appel soit envoyé par la France à Roosevelt.

Ce même jour, Reynaud avait déjà reçu un télégramme de Rossevelt en réponse à celui qu'il lui avait envoyé le 10:

Your message of June 10 has moved me very deeply. As I have already stated to you and to Mr. Churchill, this Government is doing everything in its power to make available to the Allied Governments the material they so urgently require, and our efforts to do still more are being redoubled. This is so because of our faith in and our support of the ideals for which the Allies are fighting.
The magnificent resistance of the French and British armies has profoundly impressed the American people.
I am personally particularly impressed by your declaration that France will continue to fight on behalf of democracy even if it means slow withdrawal, even to North Africa and the Atlantic. It is most important to remember that the French and British fleets continue mastery of the Atlantic and other oceans; also to remember that vital materials from the outside world are necessary to maintain all armies.
I am also greatly heartened by what Prime Minister Churchill said a few days ago about the continued resistance of the British Empire and that determination would seem to apply equally to the great French Empire all over the world. Naval power in world affairs still carries the lessons of history, as Admiral Darlan well knows.

A l'issue de son entrevue avec Churchill, Reynaud s'entretient avec Mandel, Herriot et Jeanneney qui s'opposent à toute idée d'armistice. Il rejoint ensuite le Conseil des Ministres où il annonce avoir déclaré à Churchill que le gouvernement français "avait pris la décision de ne pas conclure d'armistice et de continuer les hostilités". Le Conseil, tout en considérant l'armistice comme indispensable, s'y déclare opposé et veut continuer la résistance. La seule décision prise est le repli du gouvernement sur Bordeaux.

Conformément à la demande Churchill, Reynaud envoie un nouveau télégramme à Roosevelt le 14 juin:

Mr. PRESIDENT: I thank you for having published in America the message I sent you on June 10. I told you then that for six days and six nights our troops had been fighting without an hour of respite, and at one against three, with war material five times less powerful.
Four days of bloody fighting have gone by since then. Our army is now cut into several parts. Our divisions are decimated. Generals are commanding battalions. The Reichswehr has just entered Paris. We are going to attempt to withdraw our exhausted forces in order to fight new battles. It is doubtful, since they are at grips with an enemy which is constantly throwing in fresh troops, that this can be accomplished.
At the most tragic hour of its history France must choose.
Will she continue to sacrifice her youth into a hopeless struggle ?
Will her Government leave the national territory so as not to give itself up to the enemy and in order to be able to continue the struggle on the sea and in North Africa? Will the whole country then live abandoned abating itself under the shadow of Nazi domination with all that that means for its body and its soul ?
Or will France ask Hitler for conditions of an armistice?
We can choose the first way, that of resistance only if a chance of victory appears in the distance and if a light shines at the end of the tunnel.
In the present situation in spite of the weakening of the enemy's forces due to the sacrifice of the French army the defeat of England, our loyal ally, left to her own resources, appears possible if not probable.
From that time on France can continue the struggle only if American intervention reverses the situation by making an Allied victory certain.
The only chance of saving the French nation, vanguard of democracies, and through her to save England, by whose side France could then remain with her powerful navy, is to throw into the balance, this very day the weight of American power.
It is the only chance also of keeping Hitler, after he has destroyed France, and then England from attacking America thus renewing the fight of the Horatii against the three Curiatii.
I know that the declaration of war does not depend on you alone.
But I must tell you at this hour, so grave in our history as in yours, that if you cannot give to France in the hours to come the certainty that the United States will come into the war within a very short time, the fate of the world will change. Then you will see France go under like a drowning man and disappear after having cast a last look towards the land of liberty from which she awaited salvation.
PAUL REYNAUD

Ce même jour, F.N.F.3 remet son étude sur le transport en AFN de 900 000 hommes en trois semaines. Ce transport est jugé irréalisable avec les seuls moyens français en raison d'un tonnage insuffisant, des possibilités portuaires restreintes et du manque d'escorteurs.

Le soir même, Reynaud décide d'envoyer De Gaulle à Londres pour, entre autres:
- ammener Churchill à revenir sur ses déclarations de la veille acquiesant un armistice;
- demander le concours de la Royal Navy pour le transport d'hommes et de matériels en AFN;
- demander une implication plus massive de la Royal Air Force.

Du côté des britanniques, les jeux semblent déjà fait puisque le général Brooke, nouveau commandant britannique en France, aprés s'être entretenu par téléphone avec Churchill et le War Office, est dégagé de ses obligations envers le commandement français et devra agir en fonction de ses seuls intérêts:

You are no longer under French Command but will cooperate with any French forces which may be fighting in your vicinity. In view of tour report stating that organised resistance has come to an end you must now prepare for the withdrawal of your force to the U.K. ...

L'opération Ariel d'évacuation des troupes alliées en France démarre aussitôt et se prolongera jusqu'au 14 août.

Dans la soirée, Reynaud reçoit le délégué de Churchill, Spears, et l'ambassadeur britannique, Campbell. Les deux hommes lui porte un télégramme de Churchill assurant la France de la solidarité totale de la Grande-Bretagne dans ses épreuves. Campbell déclare explicitement que le gouvernement britannique ne donnera pas son accord à une cessation de la lutte par la France (contrairement aux déclarations de Churchill à Tours le 13).

Le 15 juin, Reynaud reçoit la réponse de Roosevelt à son télégramme:

JUNE 15, 1940.

I am sending you this reply to your message of yesterday which I m sure you will realize has received the most earnest, as well as the lost friendly, study on our part.

First of all, let me reiterate the ever?increasing admiration with which the American people and their Government are viewing the resplendent courage with which the French armies are resisting the leaders on French soil.

I wish also to reiterate in the most emphatic terms that, making every possible effort under present conditions, the Government of the United States has made it possible for the Allied armies to obtain during the weeks that have just passed airplanes, artillery and munitions of many kinds and that this Government so long as the Allied governments continue to resist will redouble its efforts in this direction. I believe it is possible to say that every week that goes by will see additional materiel on its way to the Allied nations.

In accordance with its policy not to recognize the results of conquest of territory acquired through military aggression, the Government of the United States will not consider as valid any attempts to infringe by force the independence and territorial integrity of France.
In these hours which are so heart?rending. for the French people and yourself, I send you the assurances of my utmost sympathy and I can further assure you that so long as the French people continue in defense of their liberty which constitutes the cause of popular institutions throughout the world, so long will they rest assured that materiel and supplies will be sent to them from the United States in ever?increasing quantities and kinds.
I know that you will understand that these statements carry with them no implication of military commitments. Only the Congress can make such commitments.

Weygand est informé que le général Brooke n'est plus sous ses ordres. A l'étonnement de Reynaud, Churchill répond que "Weygand ayant déclaré au général Brooke que toute résistance des armées françaises ayant cessé, le retrait des britanniques était bien naturel"...

Au cours du Conseil des ministres, on demande au général Weygand, au général Vuillemin et à l'amiral Darlan d'exposer la situation. Weygand déclare que l'Armée ne peut plus rien, Vuillemin que pour le moment il n'y a pas d'avions, mais qu'il compte en avoir dans quelques semaines, Darlan que la Flotte est toujours en état.

Le même jour, l'Amiral Darlan prends la décision de transporter l'Amirauté à Marseille et donne instructions à l'Amiral Ouest et à Odend'hal pour envoyer en Angleterre dans les plus brefs délais le Richelieu et les appareils qu'il a encore à terre et les bâtiments en essais capable de marcher ainsi que le Jean Bart à partir du 20.

Dans la soirée, Reynaud convoque l'ambassadeur britannique pour lui remettre un message informant Churchill de la proposition de Chautemps (la demande d'armistice) et lui demandant son accord. Il joint à ce message le télégramme envoyé par Roosevelt.

Churchill répondra à ce message le 16 juin donnant son accord pour l'ouverture de pourparlers d'armistice à deux conditions:
- que le gouvernement britannique soit consulté quand les conditions allemandes seront connues;
- qu'en attendant l'ouverture des pourparlers la flotte française soit dirigée vers les ports britanniques.
Parralélement est transmis à Reynaud le projet d'union franco-britanique.
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Message  roger15 15/6/2008, 20:07

Bonjour Catalina, Smile

Évidemment qu'il manque pas mal d'éléments importants. Mais j'ai estimé que mon premier message était déjà très long, et j'ai mentionné ce qu'on ne trouve habituellement pas sur les forums Internet…

A titre d'information j'ai utilisé comme source pour mon premier message les renseignements contenus dans l'excellent ouvrage, en trois tomes, de Jacques Benoist-Méchain "Soixante jours qui ébranlèrent l'Occident" paru aux éditions Albin Michel au 4ème trimestre de 1957 :
- tome I "La bataille du Nord" (10 mai - 4 juin 1940) - 454 pages ;
- tome II "La bataille de France" (5 juin - 25 juin 1940) - 543 pages ;
- tome III "La fin du régime" (26 juin - 10 juillet 1940) - 685 pages.

Pour chacune des journées que j'ai citées (donc évoquées dans le tome II) Jacques Benoist-Méchain consacre pas mal de pages :
- lundi 10 juin 1940 : 14 pages ;
- mardi 11 juin 1940 : 30 pages ;
- mercredi 12 juin 1940 : 22 pages ;
- jeudi 13 juin 1940 : 29 pages ;
- vendredi 14 juin 1940 : 13 pages ;
- samedi 15 juin 1940 : 34 pages.

Et pour la journée décisive du dimanche 16 juin 1940, que je comptais éventuellement raconter demain (du moins si ça intéresse certains d'entre vous…) Jacques Benoist-Méchain y consacre pas moins de 47 pages !!!…

C'est pourquoi je ne prétends pas du tout être exhaustif pour la relation de chaque journée, j'ai simplement voulu indiquer quels avaient été, selon moi, les éléments importants.

Voici, pour vous mettre un peu plus dans l'ambiance du samedi 15 juin 1940, ce qu'on pouvait lire à son sujet dans le quotidien "La Croix" (replié à Bordeaux) daté du lundi 17 juin 1940 (donc paru le dimanche 16 juin 1940 dans l'après-midi) :
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k443981h.item

Malheureusement "Gallica" n'a pas numérisé encore les exemplaires du "Figaro" entre le 12 et le 30 juin 1940. Son dernier numéro numérisé est celui du mardi 11 juin 1940 :
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k410625g.item

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Message  Catalina 15/6/2008, 22:14

Il ne s'agissait pas non plus pour moi d'être exhaustif concernant ces quelques jours, mais plus de pointer du doigt l'attitude britannique, que l'on peut considérer comme un véritable "lâchage" par le manque de clarté dans les objectifs poursuivis ou la décision de commencer à évacuer les troupes présentes en France avant même la proposition Chautemps de demande d'armistice....

L'attitude britannique durant ces jours cruciaux va certainement peser sur les indécis entre armistice et poursuite du combat, et pas au profit de cette derniére solution maleureu gri Ainsi, Darlan qui, le 15 juin, donnait instruction de rejoindre les ports britanniques, hésite le 16 juin entre envoyer la flotte en Afrique, en Angleterre ou aux Etats-Unis suite au message de Churchill demandant, dans les faits, ni plus ni moins que la livraison de la flotte française à la Grande-Bretagne. A cet égard, les britanniques portent sans nul doute une part de responsabilité dans l'armistice français.
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Message  roger15 15/6/2008, 22:55

Bonsoir Catalina, Smile

Je montrerai demain, à propos du 16 juin 1940, le dernier jour où l'armistice pouvait réellement évité, que trois personnages vont consciemment ou inconsciemment torpiller les dernières chances de la poursuite des combats aux côtés de l'Angleterre :
- d'abord la comtesse Hélène de Portes, la maîtresse de Paul Reynaud, qui va tout faire pour saboter le projet de fusion totale entre la France et la Grande-Bretagne ;
- ensuite Paul Reynaud lui-même qui ne saura pas présenter à ses ministres favorablement ce projet de fusion franco-britannique, pire ils vont presque tous prendre ce projet en grippe !… ;
- enfin, Georges Mandel qui au deuxième conseil des ministres de la journée (qui commence à 17h15) va commettre la stupidité d'accuser ses collègues ministres d'être des lâches et de se fait va s'attirer la désapprobation générale contre lui, et sera sèchement remis en place publiquement par Camille Chautemps, approuvé par la majorité des ministres…

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Message  Catalina 16/6/2008, 13:34

Trés franchement, le projet d'union franco-britannique ne pouvait qu'être rejeté. Proposer la fusion entre une nation déjà à terre et l'empire britannique revenait de fait à faire de la France un dominion.

[quote]A l'heure du péril où se décide la destinée du monde moderne, les gouvernements de la République française et du Royaume-Uni, dans l'inébranlable résolution de continuer à défendre la liberté contre l'asservissement aux régimes qui réduisent l'homme à vivre d'une vie d'automate et d'esclave, déclarent :
Désormais la France et la Grande-Bretagne ne sont plus deux nations, mais une nation franco-britannique indissoluble.
Une constitution de l'Union sera rédigée, prévoyant des organes communs chargés de la politique économique et financière et de la défense de l'Union.
Chaque citoyen français jouira immédiatement de la nationalité anglaise. Chaque citoyen britannique devient un citoyen français.
Les dévastations de la guerre, où qu'elles aient lieu, seront de la responsabilité commune des pays et les ressources de chacun seront confondues pour la restauration des régions détruites.
Durant la guerre, il n'y aura qu'un seul Cabinet de Guerre, pour la direction suprême de la guerre.
Il gouvernera de l'endroit qui sera jugé le mieux approprié à la conduite des opérations.
Les deux Parlements sont associés. Toutes les forces de la Grande-Bretagne et de la France, terrestres, maritimes et aériennes, seront placées sous un seul commandement suprême.
La Grande-Bretagne forme immédiatement de nouvelles armées. La France maintiendra ses forces disponibles, soit terrestres, soit maritimes, soit aériennes.
L'Union fait appel aux Etats-Unis pour fortifier les ressources des Alliés et pour apporter leur puissante aide matérielle à la cause commune.
Cette Union, cette unité, concentreront toutes leurs énergies contre la puissance de l'ennemi, où que soit la bataille - et ainsi nous vaincrons.
[/quote]

On peut noter que si la Grande-Bretagne "forme de nouvelles armées", la France doit se contenter de maintenir "ses forces disponibles" l'ensemble étant placé sous "un seul commandement suprême". Ce qui revient à placer les forces françaises sous commandement britannique au même titre que les forces des autres dominions de la Couronne. Reynaud a d'abord refusé ce projet avant de finalement l'accepter espérant plus, selon moi, influer sur les indécis en leur montrant qu'en cas de cessation des hostilités l'Empire pourrait être tenté de se désolidariser de la Métropole pour rejoindre l'Empire britannique. Il faut également relever l'empressement de Churchill à accepter ce projet, il était déjà en route pour Concarneau où devait être signé l'accord. Un empressement curieux alors qu'il avait décidé de retirer les troupes britanniques du commandement français deux jours plus tôt, démarré l'évacuation de ses troupes de France sans concertation avec l'allié auquel était proposé la fusion, et insistait de plus en plus lourdement pour faire main basse sur la flotte française sans réelle contrepartie.

Mandel était tenté de faire un coup d'état comme il l'indiquera à Zaleski, le ministre des affaires étrangéres polonais, le 15 juin:

[quote]- Pourquoi vous et vos amis politiques n'allez-vous pas de l'avant, jusqu'au coup d'Etat, s'il le faut ? lui demande avec fougue le ministre des Affaires étrangères polonais.
- Ah ! réplique M. Mandel, rien ne m'arrêterait d'agir de la sorte. Mais il ne faut pas oublier que je suis Juif. Les temps ont changé depuis l'époque où je travaillais avec Clemenceau. Les événements se sont succédés et ont laissé des cicatrices... Des gens me surveillent déjà étroitement dans la crainte que je ne fasse ce que vous venez me suggérer. Je n'hésiterais pas un instant si, parmi les politiciens et nos chefs militaires, j'avais la certitude de rallier un nombre suffisant d'hommes sûrs et résolus.
Malheureusement, je ne peux rien faire. Mais il ne faut pas désespérer... Je vais m'opposer à ce que la décision soit prise aujourd'hui. Si je réussis, les délibérations prendront peut-être demain un tour plus favorable.
[/quote]
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Message  roger15 16/6/2008, 19:01

Le dimanche 16 juin 1940.

Bonjour à toutes, et bonjour à tous, Smile

Ce fut sans doute, comme je lai déjà dit, la journée la plus dramatique de toute l'histoire de la France. Cette journée a vu Paul Reynaud, le Président du Conseil français depuis le vendredi 22 mars 1940 (où il avait remplacé Édouard Daladier) qui portait seul sur ses épaules la responsabilité de la guerre, s'effondrer en fin d'après-midi et laisser la place au Maréchal Pétain, qui n'attendait que cela pour entamer auprès des Allemands des négociations d'armistice.

Cette journée ne peut absolument pas être racontée exhaustivement, il faudrait plusieurs pages de ce forum !… Aussi, je vais seulement décrire quels ont été, selon moi, les principaux moments de ce dramatique dimanche 16 juin 1940.

A dix heures du matin Paul Reynaud reçoit à la Préfecture de la Gironde les deux présidents des Chambres françaises, Jules Jeanneney, le Président du Sénat, et Édouard Herriot, le Président de la Chambre des Députés. Conformément à la Constitution de la Troisième République il leur demande "un avis favorable au transfert du gouvernement en Afrique du Nord". Les deux Présidents ayant donné un avis favorable à ce transfert, Paul Reynaud leur demande de venir le confirmer tout à l'heure devant les ministres. A onze heures du matin s'ouvre, sous la présidence du Président du Conseil, un "Conseil de Cabinet". Les deux Présidents des Chambres y sont introduits. Seul Jules Jeanneney prend la parole au nom des deux : il renouvelle leur avis favorable au départ du gouvernement pour l'Afrique du Nord. Il précise : « Dans notre esprit, il s'agit d'un départ en vue de continuer la guerre. »

Paul Reynaud remercie les deux Présidents au nom du gouvernement. Ceux-ci se retirent, le Président de la République Albert Lebrun entre alors, et un Conseil des Ministres peut valablement délibérer. Paul Reynaud commence par leur lire la réponse du Président Roosevelt à son appel à l'aide lancé le 14 juin: le Président américain l'assure de son soutien, mais refuse d'engager les hostilités contre l'Allemagne et l'Italie… Cette lecture décevante décourage tous les ministres…

Camille Chautemps, Vice-Président du Conseil, demande à Paul Reynaud s'il a reçu une réponse de Winston Churchill à sa demande d'envisager une paix séparée avec l'Allemagne. Paul Reynaud répond qu'il n'a rien encore reçu…

C'est alors que brusquement le Maréchal Pétain, autre Vice-Président du Conseil, se lève et déclare : « Je ne peux demeurer plus longtemps au gouvernement. Plus le temps passe et plus nos armées se désagrègent. L'inévitable solution n'a été que trop retardée. Je ne veux pas m'associer à ce retard dont la France toute entière paye les conséquences. »

Le Président Lebrun et la plupart des ministres le supplient et lui demandent de rester au gouvernement. Le Maréchal accepte, mais, pour marquer sa désapprobation, il refusera de s'asseoir et restera debout jusqu'à la fin du Conseil… Le Maréchal fait savoir à Paul Reynaud qu'il ne reste au gouvernement que jusqu'à la communication de la réponse de Winston Churchill. Le président Lebrun lève alors ce premier Conseil des ministres de la journée. Un deuxième est prévu pour quinze heures.

Dans la matinée à Londres le général de Gaulle s'entretient avec Messieurs Charles Corbin (Ambassadeur de France à Londres) et Jean Monnet (Chef de la mission économique française à Londres) de leur projet, qui doit être soumis au gouvernement britannique, visant à l'union totale de la France et de la Grande-Bretagne. Selon eux, seul un "coup de théâtre" comme ce projet peut inciter Paul Reynaud et la majorité des ministres à quitter la métropole pour Alger afin de poursuivre la guerre aux côtés de l'Angleterre. Le général de Gaulle les approuve.

Lors du repas, de Gaulle plaide pour cette fusion franco-britannique auprès de Churchill. Celui-ci n'est d'abord pas du tout favorable à cette fusion, mais se laisse finalement convaincre, pour sauver Paul Reynaud.

Après le repas Winston Churchill convoque un Conseil des ministres anglais au 10 Downing Street pour examiner ce projet de fusion franco-britannique.

A 15h30 de Gaulle téléphone depuis Downing Street à Paul Reynaud le suppliant de ne pas démissionner jusqu'à ce que le Cabinet britannique termine de délibérer. Paul Reynaud répond qu'il peut retarder le Conseil des Ministres français jusqu'à 17 heures, mais guère au-delà…

A 16h30 à Downing Street Churchill sort enfin de la sale du Conseil et va immédiatement, très souriant vers de Gaulle : « Nous sommes d'accord !!!… » et il lui remet un exemplaire, en français, du texte de cet accord de fusion franco-britannique. De Gaulle le lit avec un enthousiasme extraordinaire. Il demande immédiatement à pouvoir joindre par téléphone Paul Reynaud à la préfecture de Bordeaux. Il lui dicte, mot à mot, le texte de cet accord ; Paul Reynaud le recopie en répétant chaque mot au fur et à mesure qu'il le transcrit. Edward Spears (officier de liaison entre les gouvernements français et britannique) déclare à Reynaud qu'il faut immédiatement faire taper ces feuillets à la machine à écrire pour les présenter aux ministres et il se précipite vers une des dactylographes du bureau d'à côté. Il y rencontre la comtesse Hélène de Portes, la maîtresse de Paul Reynaud, qui va tout faire pour ralentir le travail de dactylographie de la secrétaire. La comtesse, en lisant ce texte, ne cache pas, par son regard mauvais, qu'elle y est farouchement opposée !…

A 17h15 s'ouvre, sous la Présidence d'Albert Lebrun, le deuxième Conseil des ministres de la journée à la préfecture de Bordeaux.

Paul Reynaud commence par dire que le gouvernement britannique refuse que la France puisse ouvrir seule des négociations séparées en vue d'un armistice avec l'Allemagne. Plusieurs ministres protestent et veulent intervenir mais Paul Reynaud leur dit qu'il a une communication de la plus haute importance à leur faire. Il leur lit alors le texte du projet de fusion franco-britannique et déclare que demain matin il doit rencontrer Winston Churchill à Concarneau pour en discuter des modalités d'application.

Les ministres français ont écouté avec une très grande stupéfaction cette lecture du projet de fusion franco-britannique. Le premier à réagir est le Vice-Président du Conseil Camille Chautemps qui déclare aussitôt : « Je ne veux pas que la France devienne un Dominion !!! ». Plusieurs autres ministres s'associent à sa protestation.

A ce moment, entre dans la salle du Conseil un huissier qui apporte à Paul Reynaud un billet griffonné à la hâte par la comtesse Hélène de Portes : « J'espère que vous n'allez pas jouer les Isabeau de Bavière ! ». Isabeau de Bavière, femme du roi de France Charles VI, dit "Le Fol", était à l'origine du honteux traité de Troyes le 21 mai 1420 qui livrait la France aux Anglais…

Paul Reynaud a-t-il lu avec assez de conviction le projet d'union totale franco-britannique ? Toujours est-il que le Conseil est devenu après sa lecture encore plus anti-britannique qu'il l'était avant. De plus, le billet de Madame de Portes a fini d'achever la résistance de Paul Reynaud.

Camille Chautemps demande la parole et redit son couplet favori : « Il est vraiment impossible de quitter la France sans avoir demandé à l'ennemi ses conditions. ». La plupart des ministres l'approuvent.

C'est alors que Georges Mandel (ministre de l'Intérieur) déclare « Il y a ici des gens qui veulent se battre, et d'autres qui ne le veulent pas ! » Cette accusation publique de lâcheté va être très mal prise par tous les autres ministres, y compris Paul Reynaud, qui s'estiment visés très gravement par cette sentence blessante.

Mais celui qui va moucher publiquement Georges Mandel va être Camille Chautemps. Lequel, venait d'apprendre juste avant l'ouverture du Conseil que la ville de Blois (Loir-et-Cher), dont il était un ancien député, venait d'être bombardée par l'aviation allemande, bombardement qui avait fait 200 victimes !... Camille Chautemps a répondu immédiatement à Georges Mandel : « Non ! il y a des Français désespérés de la situation dans laquelle se trouve leur pays et qui cherchent le moyen de s'en sortir… D'AILLEURS JE N'AI PAS DE LEÇON A RECEVOIR DE VOUS !!!… ». De nouveau la plupart des ministres apportent leur soutien public à Camille Chautemps. Georges Mandel se sent de plus en plus marginalisé…

Paul Reynaud met fin à la polémique en déclarant que dans ces conditions le Conseil des ministres est terminé. Un nouveau Conseil des ministres (le troisième de cette journée du dimanche 16 juin 1940) va se réunir à dix heures du soir pour démissionner, afin que d'ici-là le Président de la République puisse consulter au préalable les deux Présidents de chambre. A 19h30 la séance est levée… Lorsqu'il sort de la salle du conseil Paul Reynaud rencontre l'ambassadeur des États-Unis en France, Monsieur Biddle, avec qui il échange quelques mots. L'ambassadeur est péniblement frappé par le changement de l'aspect physique du Président du Conseil français « Il était devenu littéralement gris de panique, et quelqu'un qui l'aurait vu deux semaines auparavant ne l'aurait pas reconnu. » C'est sans doute là l'explication la plus vraisemblable : Paul Reynaud a jeté l'éponge car il a craqué nerveusement. Les charges qui pesaient sur ses seules épaules étaient soudainement devenues trop lourdes à porter…

A 22 heures, lors du troisième Conseil des ministres de la journée, Paul Reynaud confirme la démission de son gouvernement. Albert Lebrun tente de le faire revenir sur sa décision, mais il refuse en disant : « Cela m'est impossible. Pour faire cette politique adressez-vous au Maréchal Pétain. »

A 23 heures, alors que Paul Reynaud s'en est allé de la préfecture de Bordeaux (accompagné de Messieurs Georges Mandel, Louis Marin, Alphonse Rio et César Campinchi ; les derniers "jusqu'au-boutistes"), Albert Lebrun prend le Maréchal Pétain à part et lui demande : « Voulez-vous constituer le gouvernement ? ». Le Maréchal Pétain sort alors une liste de son portefeuille, la tend au Président de la République en lui disant : « Le voici ! ».

A une heure du matin (donc le lundi 17 juin 1940) le maréchal Pétain fait convoquer à la préfecture de Bordeaux Monsieur de Lequerica, l'ambassadeur d'Espagne, pour lui demander de contacter par la voie diplomatique le gouvernement allemand pour lui faire savoir "à quelles conditions le Chancelier Hitler serait disposé à arrêter les opérations et à conclure un armistice ?".

Le lundi 17 juin 1940 le Maréchal Pétain lancera son célèbre appel aux Français à 12h30 sur les ondes de la radiodiffusion nationale : « C'est le cœur serré que je vous dis aujourd'hui qu'il faut cesser le combat. »

Une nouvelle page de l'histoire de France (assez sinistre !…) commence alors…

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Message  roger15 17/6/2008, 07:33

Bonjour à toutes, et bonjour à tous, Smile

Voici comment le quotidien "La Croix", replié à Bordeaux, paru le lundi 17 juin 1940 l'après-midi (et, en tant que "journal du soir", daté du lendemain, mardi 18 juin 1940) ) a annoncé la nomination de Philippe Pétain au poste de Président du Conseil :
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k443982w.item

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