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Une française juive est revenue - Suzanne Birnbaum (1946)

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Message  Colleville 23/3/2011, 22:41

Témoignage réédité en 2003 par l' Amicale des déportés d’Auschwitz et des camps de Haute-Silésie.

Je n'ai jamais lu ce témoignage mais m'étant intéressée à l'existence de Suzanne Birnbaum après la diffusion d'un reportage sur Arte en janvier dernier, voici un sujet sur son oeuvre :

Ce récit appartient à la catégorie des premiers témoignages que des rescapées du camp écrivirent quelques semaines après leur rapatriement en France.

Suzanne Birnbaum termina son manuscrit le 15 octobre 1945. Elle était revenue le 6 juin. Voici ce qu'elle nota en guise de préface :

« Je ne prétends pas faire œuvre littéraire. J'ai vu des choses tristes, souvent horribles. J'ai beaucoup souffert. Voici simplement tout ce que j'ai vu et vécu. »

Après, il fallut recommencer à vivre. Après Auschwitz, mais avec Auschwitz. Simplement, clairement, sans fioritures, sans pathos, Suzanne Birnbaum raconte son arrestation et sa déportation. Arrêtée le 6 janvier 1944, parce que juive, elle est conduite à Drancy puis déportée deux semaines plus tard. Trois jours et trois nuits de voyage où commence l'horreur. L'arrivée dans la neige, car les rails n'ont pas encore été prolongés jusqu'au cœur de Birkenau (convoi n° 66, 20 janvier 1944). Ce sera pour plus tard, pour les Juifs de Hongrie. Ils arriveront au plus près...ils mourront plus vite. Une arrivée en pleine nuit. Comme une hallucination. Dans un autre monde où on perd son nom. Elle devient le numéro 74837. Comme les autres, elle apprend vite. Obéir, pour ne pas pleuvoir sous les coups. Mais résister quand on le peut. Que le supplément de nourriture qu'on peut glaner contribue à vous maintenir en vie. Qu'une plaie peut vous faire mourir. Suzanne Birnbaum passe quelques semaines dans le camp de la quarantaine. L'apprentissage de la déshumanisation. Mal nourries, battues, à la merci des femmes chefs de block, de ces kapos sans aucune pitié, déjà malades à cause de la nourriture. Puis c'est le travail en kommando. Celui des pierres. Mais surtout celui des marais qui épuise les femmes, mal nourries, transies de froid, ravagées par la dysenterie. Des femmes qui tentent péniblement de garder leur dignité dans ces baraques où l'hygiène est inexistante. Se laver, nues dans la neige. Suzanne et d'autres femmes osent même se faire admettre à l'infirmerie du camp, le Revier, où le risque de mort est permanent. Comment soigner d'ailleurs ? Elles ont la chance d'échapper aux sélections qui régulièrement désignent des femmes pour la chambre à gaz. Comme elles ont déjà l'expérience du camp, elles savent ce que signifie la sélection. Suzanne Birnbaum évoque ces femmes qui à l'idée de mourir, deviennent folles. Elle raconte à la fois la solidarité, quand elle existe, mais aussi la haine qui anime les détenues de droit commun envers les Juives. Et avoue ne pas comprendre comment d'autres Juives kapos peuvent n'avoir aucune compassion pour leurs co-religionnaire.

Puis, elle travaille au kommando des patates, qui permet d'améliorer l'ordinaire : le troc de patates permet de mieux manger, de mieux se vêtir, d'acheter les blockowas et les stubowas (chefs de chambrées), et même d'avoir du savon.

Elle raconte l'évasion de Malla, une jeune juive belge. Rattrapée, elle fut assassinée par les SS. Personne ne sut exactement comment mais le courage dont elle fit preuve galvanisa des déportées épuisées.

A l'automne, c'est l'évacuation du camp, car les troupes soviétiques approchent. Ce sont les marches de la mort qui conduisent les femmes dans d'autres camps en Allemagne : pour Suzanne Birnbaum et ses compagnes, ce sera Bergen-Belsen puis Raghun et enfin Theresienstadt. Des mois difficiles car bon nombre d'entre elles meurent d'épuisement, de faim, du typhus, alors qu'elles avaient résisté à Birkenau.

(Source : http://pedagogie.ac-amiens.fr/histoire_geo_ic/?Une-Francaise-juive-est-revenue)

Voir aussi les commentaires de Ginette Kolinka, déportée, à propos du témoignage de Suzanne Birnbaum : document pdf

Je poste également l'analyse de l'oeuvre ici (analyse destinée à des élèves de 3ème par Laurence Krongelb, professeure)

PRESENTATION DE L’OUVRAGE

Ce document a été écrit en 1945, au retour de déportation. Publié une première fois dès 1946, ce livre est redécouvert grâce à une troisième réédition en 2003.
Son auteur, Suzanne Birnbaum a 40 ans en 1944. Elle vit à Paris où elle tient un petit magasin de couture.
Des miliciens viennent l’arrêter le 6 janvier 1944 uniquement parce qu’elle est juive.
Déportée à Auschwitz-Birkenau, elle y reste jusqu’au mois de novembre 1944. Sans savoir pourquoi, elle quitte alors Birkenau pour Bergen-Belsen, non loin de Hanovre (novembre 1944-février 1945) ; puis, elle fait partie d’un autre transport pour le camp de Raguhn en Saxe (février 1945 - avril 1945). En avril, elle se retrouve à Theresienstadt, en Tchécoslovaquie, où elle est enfin libérée.

LE TRAVAIL CONCENTRATIONNAIRE

Suzanne est grande, 1m70, et forte quand elle arrive à Birkenau. Après la quarantaine, elle est affectée à un Kommando de travail.
Suzanne reste dix mois à Birkenau, de janvier à octobre 1944. Elle est affectée successivement à trois Kommandos.
Réveillée à 3h30 au coup de sifflet et à coups de bâton sur les jambes, par les Stubowas (p. 37), il ne fallait pas espérer une minute de repos jusqu’à l’appel du soir, vers 7 heures (p. 38). Les journées sont éreintantes.
p. 37.

LE KOMMANDO 22, DIT DES MARAIS

« Quelle journée ! Douze heures de marche forcée. Ployant sous les charges impossibles à porter, glissant, tombant, frappées. » (p. 39)
« Tous les quinze jours, il fallait renouveler, remplacer les manquantes, car les trois-quarts des femmes mouraient. » (p. 40)
De tous les Kommandos, il s’agit certainement de l’un des plus pénibles et des plus inutiles aussi. L’objectif est d’édifier un talus avec de la boue transportée dans des "Tragues" (caisses en bois portatives) :
p. 38.
. un premier groupe charge les "Tragues" de boue,
. un deuxième groupe les dépose 200 m plus loin pour édifier un talus,
. un troisième groupe aplatit le talus avec de gros piliers de bois lourds.
Cependant la pluie et la neige détruisent régulièrement ce travail.
Qu’importe, il faut recommencer. L’objectif inavoué n’est-il pas de tuer aussi par épuisement ? !
Suzanne est si fatiguée qu’elle perd tout appétit (p. 41). C’est pourquoi, elle décide « d’essayer l’autre Kommando, celui des "pierres", le Kommando 105 ». Il est à noter que les femmes de son Block avaient effectivement le choix entre "le marais" ou les "pierres" (p. 37).
p. 41.

LE KOMMANDO 105 LES "PIERRES"

« Il fallait porter du matin au soir des blocs de granit avec lesquels on pavait les routes » (p. 41).
Chaque femme portait « sous le bras, appuyée sur la hanche, une pierre de 6 ou 7 kilos, parfois encore plus lourde. Nous faisions 500 m comme ça. Nous posions et nous repartions en chercher une autre. Cela faisait aussi, au bout d’une journée, 25 ou 30 km de marche » (p. 41).
Travail éreintant là aussi. Les « tripotées de coups » pleuvaient sur celles qui prenaient une pierre trop légère. Constat de Suzanne : « Ce n’était pas mieux que le Kommando des marais » (p. 41).
p. 83.

LE KARTOFFELBUNKER : LE KOMMANDO DES POMMES DE TERRE

Suzanne y passe 5 mois (sur les 10 mois à Birkenau) les moins pénibles de sa captivité (p. 83) bien que la Kapo soit « terrible et la plus brutale de toutes ».
Elle y fait différentes besognes (p. 83-84) :
. décharge les wagons de pommes de terre ou de rutabagas,
. trie les pommes de terre pour les caves de réserves et les silos,
. épluche et coupe les rutabagas pour les faire macérer dans le salpêtre et les conserver,V . aplanit ou creuse les champs pour y enfouir les provisions d’hiver,
. passe les pommes de terre au tamis :
« les grosses pour les SS, gardiens des camps »,
« les petites et les pourries pour les cochons, c’est-à-dire pour les Juifs ».
En outre, ce Kommando offre un très grand avantage. Il permet d’ « organiser » des pommes de terre, c’est-à-dire de les voler (p. 83).
« Organiser » permet de survivre. Chaque jour gagné est une espérance nouvelle et un pied de nez à l’administration et au système nazis.
Contre 6 ou 8 pommes de terre, on peut échanger : « une ration de pain ou de saucisson, de la marmelade ou de la margarine ou du linge ou des vêtements… du mitigal, précieux contre la gale » (p. 84).
Blockowas et Stubowas sensibles aux « petits cadeaux » se montraient « reconnaissantes » : pas de corvées et une plus « grande » considération.

LES AUTRES KOMMANDOS MENTIONNES DANS LE LIVRE

En effet, dans le camp, il existait bien d’autres Kommandos :
p. 67. LA COUTURE, LE TRICOT, LA WEBEREI (usine de tissage pour l’aviation).
p. 81. LA LEDERFABRIK (cuir)
p. 90. LE « CANADA »
« Il fallait rassembler tous les colis, valises et paquets que les gens, arrivant en convoi de tous les pays, jetaient obligatoirement sur le quai du train. »
« Il y avait également à trier tous les vêtements que laissaient les gens gazés ou non à l’arrivée, que l’on déshabillait. »
« Les femmes et les hommes employés au « Canada » s’arrangeaient pour sortir toutes sortes de choses » (p. 91). Ils pouvaient ainsi les échanger.

p. 91. LE SONDERKOMMANDO

« Des hommes chargés de gazer les convois arrivant » (p. 91). La tâche certainement la plus dégradante et la plus inhumaine. Bien que Suzanne rappelle que ces hommes « organisaient » et pouvaient échanger or et bijoux avec ceux du « Canada », il n’en est pas moins vrai que ces mêmes hommes étaient voués à une mort certaine, les SS effaçant tous témoins de leurs crimes.
La libération du camp de concentration de Theresienstadt a eu lieu le 8 mai 1945 par l’armée rouge.

(Source : http://www.cercleshoah.org/spip.php?article105)


On peut entendre des extraits de ce témoignages dans le documentaire d'Emil Weiss (Auschwitz - Premiers témoignages) : https://deuxiemeguerremondia.forumactif.com/t11451-auschwitz-premiers-temoignages-emil-weiss-france-2010

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Message  le ronin 24/3/2011, 08:56

Bonjour, et un grand merci pour ce "témoignage" .C'est sûr que le livre doit être une source documentaire sur la vie des camps , inégalée, car qui mieux que le vécu peut raconter ce qui s'est passé?



Amicalement .




le ronin.

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Message  Luhkah 24/3/2011, 14:02

Surprenant qu'un déporté ait choisis d'en parler aussitôt après et ait réussis à le formuler en livre.

Beaucoup d'entre eux n'en avait pas le coeur ni le courage après un tel traumatisme...

Un exemple de force de caractère et de courage. pouce gri
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Message  Phil642 24/3/2011, 18:24

Que dire?

Sinon un immense respect envers tous ces gens qui sont passés par là, par l'horreur d'un système volontairement sadique et fondalement pervers.

Que ces témoignages soient appris par l'ensemble des Humains avec l'espoir, hélas déjà trop souvent déçu, que cela ne se reproduise plus.
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Message  Dom 18/5/2011, 16:07

Bonjour ,
Très bon ouvrage qui a l'avantage d'être écrit très tôt , les souvenirs sont encore frais et intact .

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