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Comment les Russes triaient leurs prisonniers

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Message  outretemps 5/7/2014, 15:24

Bonjour à tous, 
c'est mon premier message. 
Je me présente donc, 67 ans, médecin à la retraite, après une vie bien remplie. a part cela, bien content d'en être où j'en suis, sans autres particularités.

Si je me permets une intrusion dans votre forum, c'est parce que j'ai entendu depuis mon plus jeune âge, parler des "malgré-nous".                                                   En effet, mon père, né en 1911 a dû être parmi les derniers enrôlés, ce qui explique qu'il est rentré sans une égratignure de Russie, après un séjour de quelques mois à Tambov.

C'est là un destin qui n'avait rien d'exceptionnel en soi, sinon qu'il a eu la chance de revenir indemne de cet enfer, d'après lui parce qu'il n'a jamais été grand mangeur et que de fumer des herbes séchées enroulées dans du papier journal lui suffisait pour garder le moral.

Ce que je veux dire, car jamais je n'en ai entendu parler nulle part, c'est que lorsque les Russes faisaient des prisonniers, il leur arrivait de se donner la peine de faire un tri, afin de bien distinguer les "Malgré eux" des Allemands de souche, et surtout des SS, qui bien sûr tentaient par tous les moyens de masquer leur appartenance. C'est en tout cas ce qu'il advint lorsque mon vieux fut fait prisonnier à son tour. J'évoque là une histoire bien particulière, une conduite qu'il ne faudrait en aucun cas généraliser.

Ils étaient, dans sa "fournée", d'après les dires de mon père plus d'un millier, tous capturés sur la presqu'île Hela sur les bords de la Baltique. 
Les Russes semblant parfaitement au courant du recrutement forcé d'Alsaciens dans la Wehrmacht, le problème qui se posait à eux,c'était " comment savoir qui était qui ? Alsacien ou "Herrenvolk"? 
Herrenvolk, plus l'ombre d'un seul !Tous se voulaient férocement Alsaciens, Untermensch, et surtout si possible, incorporés de force ! 
C'est que les "véritables", les bons ariens ne sentaient que trop bien le bouchon. C'était me disait mon vieux, en rigolant ( jamais plus après la guerre, pour rien au monde il aurait refoutu les pieds en Allemagne) comme si d'un coup les Alsaciens venaient d'annexer à eux tout seuls le Reich en son entier. Plus l'ombre d'un seul Allemand nulle part.

Tandis qu'à l'arrière gauche et droite de la baraque érigée en plein dans une clairière on alignait deux rangées bien distinctes de camions bâchés, les Russes ont regroupé le "troupeau entier" de prisonniers devant le petit édifice.
La façade arrière de la construction était percée de deux portes gardées chacune par deux soldats en armes, chaque ouverture donnant sur l'une ou l'autre file de véhicules. Au centre de l'unique pièce du baraquement trois officiers Russes étaient assis sur des sièges de fortune derrière une petite table sur laquelle était posé...   un parapluie ! 
Bien qu'on prit le soin d'y faire pénétrer les prisonniers un par un, le tri fut des plus rapides. Une simple question posé par l'officier interprète et l'affaire était pliée : 
Comment nomme-t-on cet objet ? et selon la réponse, décrété "Allemand" ou "Alsacien" sur un geste du gradé,  l'individu entouré des gardes, était dirigé, gauche ou droite, vers un camion. 

Comment cela est-il seulement possible ?
C'est que, nous autres, "Alsaciens depuis toujours", ayant eu le plaisir de changer constamment de nationalité, avions gardé par chance en notre patois ( pour singer la langue française que nous ne pratiquions par ailleurs que de manière fort modeste puisque annexés gothiques depuis 1870 et français entre 18 et 39) nous autres avions gardé, dis-je, l'heureuse habitude d'appeler cet engin à baleines "Bârabli": Parapluie, avec, ( ceci dit entre parenthèses ), ce délicieux et inimitable accent qui nous vaudra d'être traités de "sales Boches" jusqu'aux années 60 par les "Français véritables", dès que nous foutions nos pieds dans ce qu'on appelait, nous autres       " l'Intérieur ", à savoir la "France véritable". 

"Barabli" donc et c'était les camions de droite; "Regenschirm", comme disaient les Allemands de souche c'était à gauche, comme faire se doit. 
Une fois n'est pas coutume, la France, sans le vouloir, venait de nous sauver la mise: à droite, régime de faveur : Tambov ! 
Un vrai bonheur, comme on sait !

Mais comme disait encore mon vieux : 

" Je crois bien qu'aux "Boches", ce jour là, c'était pas leur jour de chance ! Lorsqu'on a vu comme moi, le nombre de bras se lever volontaires pour abattre pèle-mêle les gens des villages que nous traversions, après leur avoir fait creuser leurs propres tombes, lorsqu'on sait les souffrances qu'il a fallu endurer aux Russes, sans vouloir excuser, on peut pas ne pas comprendre !

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Message  Narduccio 5/7/2014, 17:17

Merci de ce témoignage.

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Message  gherla 6/7/2014, 22:40

Bonjour
Rien compris, je savais pas que nos anciens était dans un camp de vacances à Tambov.
"Une fois n'est pas coutume, la France, sans le vouloir, venait de nous sauver la mise: à droite, régime de faveur : Tambov ! 
Un vrai bonheur, comme on sait !"
 je suppose que cela doit être pris au second voir au troisième degré.
Amicalement.
Patrick.
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Message  outretemps 7/7/2014, 09:37

Bonjour et merci de votre réponse

"cadeau", tout simplement parce que les allemands de souche qui se 
trouvaient eux dirigés vers les camions de gauche étaient passés par les armes !

A choisir, (lorsqu'on est en âge d'avoir la vie devant soi),
entre endurer les très dures conditions de vie d'un camps pendant quelques mois
(et dieu sait que mon père m'en a raconté de belles), ou se voir
assassiné sans recours aucun, comme ce fut le cas pour "les autres"...
j'estime pour ma part "cadeau" de pouvoir retourner chez soi vivant.

Je ne vois donc de second degré nulle part, peut-être juste un peu de 
légèreté, histoire de dédramatiser.

cordialement.

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Message  le ronin 7/7/2014, 16:25

Et en effet, "belle" histoire si l'on peut dire . La vie et la mort ne tiennent souvent qu'à un fil, selon les circonstances.Merci de nous faire partager ce récit .




Amicalement,



le ronin.

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Comment les Russes triaient leurs prisonniers Empty Et quel fil !

Message  outretemps 7/7/2014, 21:19

Bien le bonsoir, 

je vais sans doute encore vous bassiner avec mon vieux, mais c'est suffisamment incroyable pour être raconté:

L'Alsace, il y a trois grandes villes : Strasbourg, Mulhouse, Colmar.

Lors de l'incorporation de mon père, les Allemands, forcément, ont établi des papiers militaires.
Pour un peuple où l'ordre est pratiquement une raison de vivre, rien d'exceptionnel à ça. 
Même qu'on ferait pareil en France.

Alors mon vieux : Nom, date de naissance, tout ça il donne.
Arrive lieu de naissance ? Et là... Kochma !
Kochma ? Le type le regarde... débile ? défaut d'élocution ? 
Rien à foutre :forcément, eins tzwein c'est phonétique!... va pour Colmar !


L'histoire, c'était que mes grands parents fort désireux de s'extirper de leur petite vie crasseuse de 
travailleurs textiles alsaciens germaniques médiocres avaient accepté, comme nombre d'autres du coin, l'offre alléchante
de la Russie des Tsars d'aller s'y enrichir en apprenant aux "médiéviques" du coin à se servir 
de machines à tisser les tissus comme on savait si bien faire chez nous, Mulhouse grand centre textile. 

A cette époque, 1909, faut se rappeler, l'Alsace
tout comme les alsaciens y habitant vivaient tous depuis 1870 sous le joug Allemand.
 Donc mes grands parents, avec toute une autre bandes des alentours de Mulhouse, 
s'étaient retrouvés de folles envies de vivre le plus loin possible du Kaiser, une existence de "sous-boches.
Et en avaant pour la vie de château, car vie de château, bonniches, gramophone et surtout bel appareil 
photo et matos à développer, princes du "fil à tisser" il y eut... un temps
Parqués dans le même patelin, Kochma, où deux ans plus tard naquit (contre son gré) mon vieux !
Grand luxe, pognon à foison... tous comptaient se bronzer leurs os jusqu'à la moelle des générations durant
... lorsque survint la guerre, la bonne, la définitive après laquelle y en aurait jamais plus, 
la der des ders, où "Germaniques", ils s'étaient retrouvés du jour au lendemain décrétés ennemis du pays !

Et voilà toute la bande giclée: Le pognon, Crédit Lyonnais, (déja) succursale Moscou, tapis rasé, confisqué
(le pognon, j'en ris encore lorsque j'imagine ses méandres possibles jusqu'à nos jours) 
Bref pour mes "antiques, et retour en radeau ! (disons "galère" aussi nus qu'au premier jour)

Toute cette histoire pour imaginer ce qu'il en serait advenu, sans le manque de conscience 
professionnelle du fonctionnaire militaire qui indiqua "Colmar" 
à la place de Kochma (Russie) comme lieu de naissance de mon père?

Un type né en Russie, fait prisonnier dans la Wehrmacht... C'eût été, minimum, 
le poteau direct pour trahison ! 
"Barabli" ou "Regenschirm" mille fois, c'était cause toujours, Matahari version alsacienne !

Mais je ne vous raconte cela, bien que véridique en tout, juste pour confirmer que textile ou non
la vie ne tient jamais qu'à un fil.

Amicalement, outretemps.

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Message  Ming 7/7/2014, 21:29

Ca, ça me rappelle une autre histoire... Celle d'un Allemand en Russie au moment ou la der des der éclate et ou il essaye par tous les moyens de fuir la sainte Russie. Avant de se retrouver au gnouf, puis d'être libéré sous conditions tout en étant surveillé et de fuir loin, loin dans la Sibérie...
Dans le genre destin, mon grand-père maternel en a eu un pas mal dans le genre aussi. Né Allemand, naturalisé de force français avant d'être renaturalisé encore de force allemand (avec canon sur la tempe) pour finir français définitivement après-guerre. Comme ton père, il n' a jamais évoqué la Russie avec haine, mais avec des larmes. Parce qu'il a vu ce que ton père a vu, mais tous les jours. Mais à sa différence, il a eu de la chance dans son malheur : il est revenu sans être passé par Tambov. En septembre 1945. 

J'aime tes anecdotes. Ca me rappelle beaucoup de choses. Continue...

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