Operation Torch

L'Histoire, n°379, de septembre 2012, nous a fait un numéro intéressant sur l'Opération Torch. Olivier Wieviorka dans un article intitulé: "Fallait-il débarquer en AFN ?", pages 36 à 45, refait l'histoire de cette opération qui fut avant tout voulue par les anglais, Marshall, notamment, étant plutôt partisan d'un débarquement en Europe continentale, avec Sledgehammer. Les causes du ralliement de Roosevelt à l'option britannique en Méditerranée, restent plutôt pragmatiques, avec l'horizon d'une opération victorieuse qui ne pouvait que favoriser le camp rooseveltien pour les élections américaines de mi-mandat, en novembre 42.
Wieviorka met l'accent sur la pusillanimité du plan Torch, dispersant les forces alliées sur 9 sites, étirant les troupes sur 1 400 kilomètres, trahissant le principe de concentration, et se traduisant par une campagne de Tunisie qui durera 6 mois, bien loin des espoirs alliés qui comptaient sur une campagne beaucoup plus courte.
Par contre, dans sa conclusion, l'historien parle d'une "campagne méditerranéenne désastreuse" et d'une option méditerranéenne peu pertinente à la vue de l'enlisement futur en Italie, qui retarda le débarquement en Normandie. Ici, je ne rejoins pas l'historien qui en fait ce contredit dans son article.

1°) En cette année 1942, il est fort improbable que les alliés puissent s'attaquer aux allemands sur le continent européen. C'est d'ailleurs Wieviorka qui précise que l'opération Torch, contre les seuls vichystes, fut plus que laborieuse, avec des GI inexpérimentés. Et c'est même l'historien qui affirme qu'heureusement que les allemands n'ont pas reçu les alliés sur les plages nord-africaines, sous peine d'une déconvenue bien plus grande.

2°) Parler d'une "campagne méditerranéenne désastreuse" me semble fortement exagéré. Certes, la campagne de Tunisie a duré beaucoup plus que prévu par les stratèges alliés, certes, les forces alliées se sont enlisées en Italie, mais il ne faut pas oublier que Torch permit:
- la perte de 150 000 à 240 000 soldats de l'Axe après la capitulation germano-italienne de mai 1943, avec une division d'élite, comme la Hermann Goering, entièrement faite prisonnière !
- la fin du régime mussolinien, en juillet 1943, après l'opération Husky et le débarquement en Sicile et le passage de l'Italie dans le camp allié. Alors même si l'Italie fut un allié à l'efficacité incertaine, il n'en reste pas moins qu'elle était un partenaire important pour le Reich, et qu'il fallut détourner une vingtaine de divisions dans la péninsule italienne pour contrer l'avance alliée.

3°) La campagne d'Italie retarda le débarquement en Normandie ? On peut se demander si les alliés avaient la possibilité, sans cette campagne transalpine, de débarquer en France en 1943.

Bref, l'option méditerranéenne, en 1942, était la seule possible et eut au moins le mérite de faire de la Méditerranée une mer anglo-saxonne et de faire chuter un des plus fidèles soutien d'Hitler, Mussolini.