M. Bardzinski, vétéran polonais des combats de Normandie
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M. Bardzinski, vétéran polonais des combats de Normandie
Les traditionnelles cérémonies en Normandie, en août, à Montormel, permettent de commémorer les terribles combats pour la fermeture de la Poche de Falaise.
C'est l'occasion pour tous de partager des moments privilégiés avec les vétérans présents (Polonais de la 1ère DB polonaise, Français des FFL et aussi Allemands d'ailleurs).
Parmi ce vétérans, monsieur Sylwester Bardzinski à qui j'avais remis un petit questionnaire et qui m'a répondu, grâce à l'aide de sa fille qui maîtrise la langue française, pour me livrer quelques-uns de ses souvenirs. Monsieur Bardzinski était dans le même char que le Prince Poniatowski (descendant de l'illustre Maréchal d'Empire) qui trouva la mort au cours de la campagne de Hollande. Je précise d'ailleurs que j'ai pu aussi rentrer en contact avec les descendants du Prince Poniatowski (M. Le Comte Guillaume de Louvencourt) qui m'ont autorisé à mettre en ligne sur mon blog les documents de leur aieul (gallerie "10th armored brigade - 10. Brigade blindée" de mon blog :
http://maczek.blog4ever.com/blog/index-100395.html
Je vous livre ici le témoignage de M. Bardzinski, qui devrait être à nouveau présent l'été prochain ; bref, imprimez ce témoignage, ou une belle photo de lui, et cela donnera l'occasion de demander un bel autographe.
Photo portrait, début de guerre.
Je suis né en 1918, à Jaksice, un petit village près de Bydgoszcz (dans la région de Poznan). J'ai 5 frères et soeurs : Bruno, Stacia, Klemens, Teresa et Marisz.
Juste avant la guerre, j'ai commencé des études polytechniques à Inowroclaw. En 1938, j'ai rejoint l'armée polonaises conscient que la politique d'Hitler nous mènerait à la guerre (politique d'annexion des Sudètes et de la Tchécoslovaquie). En 1939, la Pologne est envahie en quelques semaines, et je décide de fuir vers le sud du pays, j'atteins ainsi la Roumanie. Aux alentours de Braszow, je suis fait prisonnier et je tente de m'évader. Par deux fois je suis repris, la troisième tentative est la bonne ! Je traverse la Yougoslavie, l'Italie et j'arrive en France le 10 mai 1940, date funeste puisque c'est le jour où les Allemands lance leur offensive vers l'Ouest. Je rejoins néanmoins l'armée polonaise libre en France mais à son tour, la France est envahie. Je réussis à prendre place dans le bateau "Batory" pour l'Angleterre.
Je rejoins les forces polonaises libres cette fois-ci sur le sol britannique, dans les forces blindées. J'intègre le 1er Régiment Blindé dans la 1ère DB polonaise, sous le commandement du général Maczek.
M. Bardzinski avec un camarade.
M. Bardzinski, hiver, en manteau. Insigne sur la manche : la 16ème Brigade Blindée (dragon noir sur fond orange).
M. Bardzinski avec son premier char, en GB.
Après quatre longues années de fomation et d'entraînement intensifs, je débarque avec mon régiment le 30 juillet 1944 à Arromanches.
La première action a commencé quand nous avons quitté Caen. Pour l'opération, nous étions passés sous la commandement du 2ème Régiment Blindé. Environ 25 chars (la moitié du régiment) ont été détruits.
Le 9 aout, le 1er Régiment Blindé s’est mis en action. Je faisais alors partie du 1er Régiment Blindé, 1ère compagnie, 2ème peloton.
Nous avons très bien avancé, pendant toute la journée, mais le soir nous sommes entrés en contact avec l’ennemi.
L’ennemi se terrait, on ne pouvait voir personne.
Mon char a pris alors un tir au but, à 20 cm de la tête du chauffeur. L'obus est entré par le flanc, a traversé le char et est ressorti ! Il a détruit le périscope, et du coup je ne pouvais plus rien voir, et j'ai du ouvrir la porte en haut pour conduire. A ce moment-là, une balle m'a blessé à la tête. Le radio-opérateur, qui était à mes côtés, à son tour était blessé au bras. La balle restait fixée au canon !
Le radio-opérateur m'a ausitôt dit de me diriger vers un bois tout proche, pour s'y mettre à couvert, mais il ne voyait rien et disait de pas attendre le troisième impact sur noutre équipage. Nous cinq avons sauté dehors. C’était un super saut ! Quand on est debout dans le char, juste la tête est dehors. Il fallait vite s'extraire. Nous sommes tous directement tombés sur la terre.
Le char, normalement conduit par moi-même, se retrouve sans chauffeur et s'arrête quelques mètres plus loin.
C’était au mois d’août donc le blé et l’herbe étaient très grands. Les soldats savaient que l’ennemi était caché partout, et qu’ils pouvaient nous voir très bien. Les balles venaient de tous les coins. Nous avons pris nos revolvers et avons rampé pour nous mettre à l'abri.
Pendant ce combat, 8 chars ont été totalement brûlés, et 15 soldats sont morts. Entre-temps, l’ennemi avait décroché et on a arrêté le combat. Je suis retourné vers les autres. Mon chef de char, blessé également, devait être remplacé. On a alors vu arriver un autre commandant : le prince Poniatowski. Tout cela se passait à la côte 111, du côté de Soignolles.
Les jours suivants, nous nous sommes dirigés vers Jort. Là, on a forcé la rivière La Dives, où il n’y avait pourtant pas de pont. Quelques chars pouvaient traverser la rivière, mais la plupart des suivants devaient être tirés et aidés par les autres.
C’était la nuit du 15-16 août, et les Allemands nous éclairaient, mais ils ne nous ont pas bombardés.
Puis nous avons fait mouvement vers Mont Ormel.
Le 16 août, soigné, je prends place dans un nouvau char avec un nouveau commandant de char : le lieutenant Marie-André Poniatowski. Dès le début, nous apprécions cet officier, que nous appelons "Mon Prince" ce qu'il ne voulait pas. Il ne voulait pas de régime de faveur, voulait toujours être traité de la même manière que les simples soldats, dormir dans les mêmes conditions, manger les mêmes rations.
A ce moment, aucun soldat ne savait ce qu'était la mission. Pour nous, c’était conduire par des routes épaisses, sans lumières et sans radio. On a conduit plus de 10 km dans les lignes allemandes. La mission était d'atteindre la cote 262 (Mont Ormel). Depuis ce mont, on avait une vue sur toutes les sorties par lesquelles l’ennemi pouvait s’enfuir. S’enfuir du fameux "sac", de la fameuse "Poche" comme on l’a nommée après.
Jusqu’au 21 août, les soldats polonais du 1er Régiment Blindé (52 chars) étaient sur ce mont, entourés de l’ennemi, sans provision, sans contact avec les autres divisions.
Nous espérions rejondre les soldats américains, qui devaient venir de l’autre coté pour nous aider.
La division polonaise combattait avec la 4e division canadienne. Le général Maczek obtenait d'ailleurs ses ordres du général canadien.
Ces Canadiens ont eu tant de résistance de la part des Allemands, qu’ils pouvaient seulement atteindre le Mont Ormel quand le combat était déjà fini. C’était pareil pour les camions de provisions. Aucun camion n’atteignait les lignes de combats. Les allemands les détruisaient tous. Tous ces jours, les polonais combattaient en fournissant de grands efforts. Quant la tourelle de notre char était tournée vers la droite, les Allemands nous attaquaient par la gauche, et inversement. Les Allemands s’enfuyaient, mouraient ou étaient faits prisonniers.
Pendant trois jours et trois nuits, les Polonais ont livré un grand combat. C’était le 21 août que les Américains pouvaient enfin atteindre le mont. Je me rappelle ausi d'un Canadien qui nous a dit : « How have you done this, you fucking polish !!" Car tous les petits chemins qui donnaient accès sur ce mont étaient couverts de corps humains, de corps de chevaux, de chars détruits. C’était la catastrophe. Personne ne pouvait y marcher ou rouler normalement.
Le sherman de M. Bardzinski, avec de nombreux compagnons.
J'ai travaillé à la suite qui ne devrait pas tarder. Promis.
Sachez que ce article a été proposé dans les bulletins d'informations de l'Association Nationale des Anciens Combattants et du Souvenir de la 1ère DB polonaise. On y présente régulièrement des témoignages inédits de combattants polonais de la 1ère DB. Si le sujet vous intéresse, vous pouvez adhérer...
Ze-Pole
C'est l'occasion pour tous de partager des moments privilégiés avec les vétérans présents (Polonais de la 1ère DB polonaise, Français des FFL et aussi Allemands d'ailleurs).
Parmi ce vétérans, monsieur Sylwester Bardzinski à qui j'avais remis un petit questionnaire et qui m'a répondu, grâce à l'aide de sa fille qui maîtrise la langue française, pour me livrer quelques-uns de ses souvenirs. Monsieur Bardzinski était dans le même char que le Prince Poniatowski (descendant de l'illustre Maréchal d'Empire) qui trouva la mort au cours de la campagne de Hollande. Je précise d'ailleurs que j'ai pu aussi rentrer en contact avec les descendants du Prince Poniatowski (M. Le Comte Guillaume de Louvencourt) qui m'ont autorisé à mettre en ligne sur mon blog les documents de leur aieul (gallerie "10th armored brigade - 10. Brigade blindée" de mon blog :
http://maczek.blog4ever.com/blog/index-100395.html
Je vous livre ici le témoignage de M. Bardzinski, qui devrait être à nouveau présent l'été prochain ; bref, imprimez ce témoignage, ou une belle photo de lui, et cela donnera l'occasion de demander un bel autographe.
Photo portrait, début de guerre.
Je suis né en 1918, à Jaksice, un petit village près de Bydgoszcz (dans la région de Poznan). J'ai 5 frères et soeurs : Bruno, Stacia, Klemens, Teresa et Marisz.
Juste avant la guerre, j'ai commencé des études polytechniques à Inowroclaw. En 1938, j'ai rejoint l'armée polonaises conscient que la politique d'Hitler nous mènerait à la guerre (politique d'annexion des Sudètes et de la Tchécoslovaquie). En 1939, la Pologne est envahie en quelques semaines, et je décide de fuir vers le sud du pays, j'atteins ainsi la Roumanie. Aux alentours de Braszow, je suis fait prisonnier et je tente de m'évader. Par deux fois je suis repris, la troisième tentative est la bonne ! Je traverse la Yougoslavie, l'Italie et j'arrive en France le 10 mai 1940, date funeste puisque c'est le jour où les Allemands lance leur offensive vers l'Ouest. Je rejoins néanmoins l'armée polonaise libre en France mais à son tour, la France est envahie. Je réussis à prendre place dans le bateau "Batory" pour l'Angleterre.
Je rejoins les forces polonaises libres cette fois-ci sur le sol britannique, dans les forces blindées. J'intègre le 1er Régiment Blindé dans la 1ère DB polonaise, sous le commandement du général Maczek.
M. Bardzinski avec un camarade.
M. Bardzinski, hiver, en manteau. Insigne sur la manche : la 16ème Brigade Blindée (dragon noir sur fond orange).
M. Bardzinski avec son premier char, en GB.
Après quatre longues années de fomation et d'entraînement intensifs, je débarque avec mon régiment le 30 juillet 1944 à Arromanches.
La première action a commencé quand nous avons quitté Caen. Pour l'opération, nous étions passés sous la commandement du 2ème Régiment Blindé. Environ 25 chars (la moitié du régiment) ont été détruits.
Le 9 aout, le 1er Régiment Blindé s’est mis en action. Je faisais alors partie du 1er Régiment Blindé, 1ère compagnie, 2ème peloton.
Nous avons très bien avancé, pendant toute la journée, mais le soir nous sommes entrés en contact avec l’ennemi.
L’ennemi se terrait, on ne pouvait voir personne.
Mon char a pris alors un tir au but, à 20 cm de la tête du chauffeur. L'obus est entré par le flanc, a traversé le char et est ressorti ! Il a détruit le périscope, et du coup je ne pouvais plus rien voir, et j'ai du ouvrir la porte en haut pour conduire. A ce moment-là, une balle m'a blessé à la tête. Le radio-opérateur, qui était à mes côtés, à son tour était blessé au bras. La balle restait fixée au canon !
Le radio-opérateur m'a ausitôt dit de me diriger vers un bois tout proche, pour s'y mettre à couvert, mais il ne voyait rien et disait de pas attendre le troisième impact sur noutre équipage. Nous cinq avons sauté dehors. C’était un super saut ! Quand on est debout dans le char, juste la tête est dehors. Il fallait vite s'extraire. Nous sommes tous directement tombés sur la terre.
Le char, normalement conduit par moi-même, se retrouve sans chauffeur et s'arrête quelques mètres plus loin.
C’était au mois d’août donc le blé et l’herbe étaient très grands. Les soldats savaient que l’ennemi était caché partout, et qu’ils pouvaient nous voir très bien. Les balles venaient de tous les coins. Nous avons pris nos revolvers et avons rampé pour nous mettre à l'abri.
Pendant ce combat, 8 chars ont été totalement brûlés, et 15 soldats sont morts. Entre-temps, l’ennemi avait décroché et on a arrêté le combat. Je suis retourné vers les autres. Mon chef de char, blessé également, devait être remplacé. On a alors vu arriver un autre commandant : le prince Poniatowski. Tout cela se passait à la côte 111, du côté de Soignolles.
Les jours suivants, nous nous sommes dirigés vers Jort. Là, on a forcé la rivière La Dives, où il n’y avait pourtant pas de pont. Quelques chars pouvaient traverser la rivière, mais la plupart des suivants devaient être tirés et aidés par les autres.
C’était la nuit du 15-16 août, et les Allemands nous éclairaient, mais ils ne nous ont pas bombardés.
Puis nous avons fait mouvement vers Mont Ormel.
Le 16 août, soigné, je prends place dans un nouvau char avec un nouveau commandant de char : le lieutenant Marie-André Poniatowski. Dès le début, nous apprécions cet officier, que nous appelons "Mon Prince" ce qu'il ne voulait pas. Il ne voulait pas de régime de faveur, voulait toujours être traité de la même manière que les simples soldats, dormir dans les mêmes conditions, manger les mêmes rations.
A ce moment, aucun soldat ne savait ce qu'était la mission. Pour nous, c’était conduire par des routes épaisses, sans lumières et sans radio. On a conduit plus de 10 km dans les lignes allemandes. La mission était d'atteindre la cote 262 (Mont Ormel). Depuis ce mont, on avait une vue sur toutes les sorties par lesquelles l’ennemi pouvait s’enfuir. S’enfuir du fameux "sac", de la fameuse "Poche" comme on l’a nommée après.
Jusqu’au 21 août, les soldats polonais du 1er Régiment Blindé (52 chars) étaient sur ce mont, entourés de l’ennemi, sans provision, sans contact avec les autres divisions.
Nous espérions rejondre les soldats américains, qui devaient venir de l’autre coté pour nous aider.
La division polonaise combattait avec la 4e division canadienne. Le général Maczek obtenait d'ailleurs ses ordres du général canadien.
Ces Canadiens ont eu tant de résistance de la part des Allemands, qu’ils pouvaient seulement atteindre le Mont Ormel quand le combat était déjà fini. C’était pareil pour les camions de provisions. Aucun camion n’atteignait les lignes de combats. Les allemands les détruisaient tous. Tous ces jours, les polonais combattaient en fournissant de grands efforts. Quant la tourelle de notre char était tournée vers la droite, les Allemands nous attaquaient par la gauche, et inversement. Les Allemands s’enfuyaient, mouraient ou étaient faits prisonniers.
Pendant trois jours et trois nuits, les Polonais ont livré un grand combat. C’était le 21 août que les Américains pouvaient enfin atteindre le mont. Je me rappelle ausi d'un Canadien qui nous a dit : « How have you done this, you fucking polish !!" Car tous les petits chemins qui donnaient accès sur ce mont étaient couverts de corps humains, de corps de chevaux, de chars détruits. C’était la catastrophe. Personne ne pouvait y marcher ou rouler normalement.
Le sherman de M. Bardzinski, avec de nombreux compagnons.
J'ai travaillé à la suite qui ne devrait pas tarder. Promis.
Sachez que ce article a été proposé dans les bulletins d'informations de l'Association Nationale des Anciens Combattants et du Souvenir de la 1ère DB polonaise. On y présente régulièrement des témoignages inédits de combattants polonais de la 1ère DB. Si le sujet vous intéresse, vous pouvez adhérer...
Ze-Pole
Re: M. Bardzinski, vétéran polonais des combats de Normandie
Juste ce petit message pour informer que M. BARDZINSKI sera présent aux commémorations du samedi 22 août 2009.
Sont aussi attendus d'autres vétérans :
M. PODYMA, Compagnie d'Etat-Major
M. STAVI, Escadron de mitrailleuses et de mortiers lourds
M. STEFANSKI, 24ème régiment de Lanciers
M. MIECZKOWSKI, 1er Régiment Blindé.
Ze-Pole
Sont aussi attendus d'autres vétérans :
M. PODYMA, Compagnie d'Etat-Major
M. STAVI, Escadron de mitrailleuses et de mortiers lourds
M. STEFANSKI, 24ème régiment de Lanciers
M. MIECZKOWSKI, 1er Régiment Blindé.
Ze-Pole
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