Batterie Karola
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Batterie Karola
Voilà un petit article commis par votre serviteur rédigé à partir de différents documents trouvés à la conservation des MH Poitou-Charentes:
Historique du Stüntzpunktgruppe Karola (Ro 429) :
L’occupation du fort de La Pallice par la Marine allemande et la construction très tôt d’une grande base sous-marine devait entraîner très rapidement la mise en état de défense, pour des nécessités évidentes de protection de cette base, des îles de Ré et d’Oléron. En outre, la position saillante de l’île de Ré et les bonnes possibilités de tir qui en découlent la prédestinait tout naturellement à l’implantation d’une batterie à longue portée comme les Allemands en ont installé sur divers points saillants de la côte.
Le groupe d’ouvrage constituant la batterie Karola fut construit entre 1942 et 1944 par l’armée allemande sur un site vierge. Elle est occupée par la 4e batterie de la MAA 282 sous les ordres de l’Oberstleutnant zur See Mazenburg qui regroupe près de 200 artilleurs. Chose étonnante elle partage le terrain avec l’armée de terre qui installe également sa plus grosse batterie du secteur nommée Kora (Ro 425). Ni attaqué, ni bombardé, Karola se trouvait comprise dans le «verteidungsbereich La Rochelle» lorsque, bloquée par les troupes françaises jusqu’au 8 mai 1945, la garnison allemande déposa les armes à la suite de la capitulation générale du IIIe Reich. Ses canons tirèrent sur cibles réelles une seule fois dans la nuit du 14 et du 15 août 1944, sur une flottille alliée qui croisait au large.
Restitués avec armement et matériel intact, les ouvrages ont été conservés tels quels pendant une quinzaine d’années, puis le matériel a été démonté et vendu comme vieille ferraille. Les bâtiments et le terrain d’emprise se trouvent toujours en domaine militaire de la Marine.
Situation et composition d’ensemble :
Le groupe d’ouvrages connu sous le nom de batterie Karola se trouve à 150m au NO du village d’Ars-en-Ré, et résulte du rassemblement d’organes affectés à des missions distinctes, à savoir :
- une batterie lourde de la Marine à deux tourelles doubles de 203mm C/34 d’une portée de 37 km. Cet ouvrage très rare est une combinaison de 2 Regelbauten Schwer 473 et 483.
- 4 canons français de 220mm Mle 1917 en cuves
- un poste d’éclairage formé par un 150mm TAC/36
- des ouvrages de défense rapprochée de la côte (ouvrages Kora).
- des ouvrages de défense antiaérienne (ouvrages Kathe).
- un garage, une écurie, 2 réfectoires cuisines, une infirmerie, un théâtre, un abri aumônerie, et même un bâtiment de la Gestappo comme semble l’attester une croix gammée dessinée dans le carrelage à l’entrée du bâtiment.
Ces ouvrages sont dispersés sur un terrain vague d’environ 35 ha compris entre le littoral et la N.735 ; ils étaient protégés, à l’origine, par des obstacles (champs de mines et réseaux de barbelés) et des organes de défense rapprochée sur tout le périmètre. L’ensemble comprend 19 blocs bétonnés actifs et passifs de protection variable (un poste de commandement et de direction de tir, 2 blocs-tourelle, quatre cuves de 220mm, 5 emplacements de type «tobrouk» ou similaires, 7 abris passifs), ainsi que des baraquements légers à usage de logement pour la garnison.
Poste de commandement et de direction de tir :
Cet ouvrage est implanté en retrait de prés de 500m des blocks-tourelles. C’est un bâtiment monolithique rectangulaire en béton armé, semi enterré, de 20 x 22 m, à un seul niveau, d’où émerge une tour d’observation également en béton, de 16.5m de haut (cuirassement exclus) et 7.5m de côté dans la partie courante.
La protection est de 2m pour la dalle, 2m pour les murs de fond, les murs latéraux et une partie de la façade de gorge, 1,5m pour les murs de tête de la caponnière de gorge. L’ouvrage est terrassé sur 3 côtés ; seule la façade de gorge reste dégagée et comporte en son milieu comme seule saillie de la caponnière.
Au rez-de-chaussée, les locaux sont répartis selon un plan en U renversé, autour du massif de base de la tour. Les deux branches du U, partant des deux entrées, sont constituées chacune par un couloir de circulation desservant une série de locaux à usage de chambres, bureaux, ect., au nombre de six à gauche et de6 à gauche et de 5 à droite. Le fond de l’abri (côté SO donc) est occupé sur presque toute sa largeur par la grande salle d’opérations (12,60 x 4,5m), où étaient suivis et reportés sur des cartes les informations transmises par la tour, les objectifs et leur route. On y élaborait également les éléments de tir qui étaient transmis aux tourelles.
A l’arrière, entre le massif de base de la tour et la caponnière, se trouvent les locaux de la centrale électrique (salle du Groupe,, réservoirs et la chambre de tir de la caponnière de gorge ; le tout n’est accessible que par une porte de communication ouvrant sur le vestibule de l’entrée de droite. Cette disposition judicieuse permettait au personnel du poste de commandement (graphiqueurs, téléphonistes, téléjointeurs, ect.) de ne pas être trop gênés par le bruit du groupe électrogène.
L’accès, depuis l’extérieur, à ce rez-de-chaussée se fait par deux entrées disposées symétriquement aux extrémités de la façade de gorge et flanquées à l’extérieur par les créneaux de la caponnière de gorge. Ces entrées, tracées en chicane, sont en outre prises chacune d’enfilade par un créneau de défense intérieure. On trouve en façade une porte grille et à l’intérieur, une porte blindée étanche.
Le poste de commandement proprement dit est surmonté d’une tour d’observation émergeant de la dalle de 16.50m, hauteur à laquelle il conviendrait d’ajouter les 2,5 à 3m de hauteur de la coupole du télémètre, aujourd’hui disparu, et les 4,8m de hauteur du rez-de-chaussée (2,8m de hauteur sous plafond, plus 2m en dalle), pour obtenir la hauteur totale : 23 à 24m, dont environ 19m émergeant.
Cette tour d’observation comprend trois parties :
Une première, de 13,8m (dont 4,8m pris dans l’abri comme embase), de plan carré aux angles arrondis, abrite la cage d’escalier à 5 niveaux. Ceux-ci sont constitués par 5 chambres palières-aveugles, reliées par des escaliers à trois volées droites, séparées par des repos et totalisant 74 marches. Cette première partie de la tour est protégée par des parois de 2m d’épaisseur. On notera que le raccordement des parois verticales de la tour avec la dalle de l’abri constitue un dièdre concave dangereux qu’il eût convenu d’amortir en pan coupé. Ajoutons enfin qu’il existe un forage d’eau au rez-de-chaussée de cette cage d’escalier.
Cette première partie porte un premier étage d’observation avec à l’avant une chambre demi-circulaire disposée en balcon saillant et percée d’un large créneau panoramique de surveillance de 50cm de haut sur 200° d’ouverture environ. A l’arrière se trouve un petit poste de guet auxiliaire avec créneau de 80cm d’ouverture et 20cm de haut. Ces deux locaux sont reliés à la chambre palière par des passages fermés par des portes blindées étanches.
Au-dessus se trouve un 7e niveau, auquel on accède par une échelle de meunier. Ce niveau est disposé en balcon saillant sur la face arrière de la tour. Il est constitué d’une chambre palière de 4x4m, prolongée à l’avant par un blockhaus saillant rectangulaire à deux niveaux, reposant sur la visière de la chambre de surveillance du 6e niveau (cette superposition de 2 étages saillants en porte-à-faux l’un à l’avant, l’autre à l’arrière, paraît correspondre à un souci de stabilité de l’édifice).
Ce blockhaus a ses parois en béton doublées extérieurement de plaques de blindage de 10cm d’épaisseur, et intérieurement de tôles sur fers. Il comporte trois créneaux d’observation cuirassés, un axial et deux latéraux. Le plancher et le plafond sont percés chacun d’un orifice cylindrique correspondant vraisemblablement à un périscope éclipsable à grande puissance.
Notons enfin qu’un passage cylindrique percé dans la dalle de bitume donne un accès à la plate-forme supérieure, qui portait à l’origine une coupole blindée tournante pour télémètre de 12m de base (grossissement 65) aujourd’hui disparu. A l’extrados de la dalle se voient encore les goujons de fixation de la sellette de la coupole.
Les blocs-tourelle :
Les 2 blocs-tourelle constituent l’artillerie principale de la batterie. Ils sont implantés dans la partie SO du terrain d’emprise, à 150m l’un de l’autre et à courte distance du rivage (200m pour le bloc X et 150m pour le bloc IX). Ils sont défilés aux vues du large par la dune littorale et il semble qu’ils ne faisaient que du tir indirect sur éléments transmis par le Poste de Direction de Tir, situé 500m en retrait.
Tous deux sont identiques et offrent l’aspect d’une construction monolithique en béton armé à 2 niveaux : un rez-de-chaussée terrassé et un sous-sol partiel. Chaque ouvrage est traité en variante de la protection A (3,5m de dalle, mais murs latéraux de 2m seulement) et dispose d’une autonomie complète en eau, électricité, ventilation, ect. Le plan assez complexe, est constitué dans les grandes lignes par trois rectangles accolés, chaque rectangle correspondant à un groupe de locaux répondant à une fonction spécifique :
- Accès, couloir central et services généraux (ateliers, puits...)
- Tourelle et soute à munitions
- Centrale électrogène, au N des précédents
Cette disposition a le désavantage de donner à la carapace bétonnée des parois verticales des dièdres rentrants guidant vers l’ouvrage les projectiles à trajectoire oblique, au lieu de les faire ricocher au loin. Il s’agit là, sans conteste, d’une faute technique de conception que les Allemands ont su éviter dans d’autres ouvrages.
L’accès, situé à l’extrémité SO de l’ouvrage, se fait par un passage en tranchée, aux parois bétonnées épaisses, qui est recouvert d’un plafond mince de tôles nervurées portant une mince couche de terre de camouflage. Ce plafond est incliné et se raccorde à la pente du talus du massif de terre enveloppant le bloc. La tranchée pénètre dans l’ouvrage par un vestibule extérieur qui se trouve pris en enfilade par les 2 créneaux pour arme automatique de la caponnière, et aboutit de plain-pied à la porte blindée après une brisure d’alignement destinée à masquer aux vues de l’extérieur la dite porte. Celle-ci donne accès à un large couloir central de 12,5 x 2,8m qui dessert :
- à gauche, quatre locaux de servitude (atelier, magasin, chambre du puits d’eau...)
- à droite, la caponnière d’entrée, la centrale électrogène et ses annexes
- au fond, un dégagement donnant accès aux locaux de la tourelle, l’escalier menant au sous-sol et deux locaux de servitude.
La centrale électrogène comprend 4 pièces :
- La salle des machines proprement dite avec le socle du groupe, le tableau, le jeu de barres et les accessoires
- Une petite chambre, au fond de la salle du groupe, à usage des réservoirs d’eau de refroidissement
- Un local abritant l’aérorefroidisseur, avec, dans les parois, les orifices de départ des trois cheminées correspondant à l’échappement, à l’aspiration et au refoulement de l’aérorefroidisseur
- Un local, isolé des trois autres, correspondant au réservoir à combustible
Les tourelles comprennent, à chaque niveau, trois locaux en alignement et semblablement disposés, à savoir :
- Au centre, les puits de la tourelle, local sensiblement carré de 5x5,5m se prolongeant à travers la dalle par un orifice cylindrique de 5,4m de diamètre servant de passage du pivot du cuirassement, orifice actuellement à l’air libre, mais à l’origine recouvert par la cage de la tourelle. Au rez-de-chaussée un plancher reposant sur des laminés scellés dans le béton séparait l’étage intermédiaire de l’étage inférieur. On notera qu’à sa partie supérieure, le puits de tourelle dépasse la dalle du bloc de 2m. Cette émergence porte un rétrécissement correspondant au guidage supérieur du pivot, puis un élargissement correspondant au logement du blindage annulaire jouant le rôle d’avant-cuirasse. La tourelle elle-même a disparu. On sait qu’il s’agissait d’une tourelle tournante type Marine, armée de pièces de 203mm provenant du désarmement du croiseur «Seydlitz» alors en construction. De part et d’autre du puits de la tourelle, et séparés de celui-ci par des piédroits de 1cm d’épaisseur percés chacun d’une porte et de deux guichets de distribution se trouvent les soutes à munitions, vastes locaux de 5,3x5,35m. On notera qu’à chaque niveau les portes faisant communiquer les trois locaux (soute et puits de tourelle) sont placées exactement dans le même alignement, mais qu’elles sont décalées d’un niveau sur l’autre. D’autre part, du fait de l’enlèvement des parties métalliques et du plancher, et du noyage par les eaux de pluie de l’étage inférieur, on ne peut plus accéder partout et déterminer certains détails, tels que l’affectation exacte des soutes (obus et gargousses) l’organisation de la sellette de base du pivot.
- Chaque bloc est pourvu d’un puits d’eau de 80cm de diamètre foré dans des locaux de gauche au rez-de-chaussée.
- La ventilation comportait la bouche de prise d’air, rectangulaire, au-dessus de la porte d’entrée et un réseau de gaines d’amenée et de distribution.
- Dans un local du rez-de-chaussée, on remarque encore les restes de la climatisation avec, sur le circuit de ventilation, une batterie de chauffe électrique et une batterie de chauffe alimentée par l’eau de refroidissement du groupe. Il est vraisemblable que la ventilation comportait un système de filtration des gaz toxiques.
- Le logement du personnel est réparti dans les divers locaux (couchettes métalliques rabattables).
- Une voie de 60cm scellée dans le béton du sol court dans la tranchée d’accès et le couloir central. Elle permettait d’amener le matériel et les munitions jusqu’aux locaux de la tourelle.
- Conformément aux traditions de la Kriegsmarine, l’un des blocs tourelle était baptisé « Anton » et le second « Bruno » (relevé sur le marquage d’accessoires trouvés dans les locaux).
Conclusion :
En fait, conçue par des marins, la batterie Karola, avec ses 2 blocs-tourelle, ses 4 cuves circulaires pour canon de 220mm, ses abris à personnel et munitions, et munitions, son blockhaus et sa tour de télémètre, évoque l’image d’un croiseur de bataille enfoui dans le sol et dont les différents éléments auraient été dispersés sur le terrain pour compenser la vulnérabilité résultant de la fixité.
On fera d’autre part remarquer que, bien que les tourelles tournantes de tir soient à révolution totale (de même que la coupole du télémètre), les chambres de vieille et blockhaus-observatoires des sixièmes et septième niveaux sont axés sur une capitale orientée sensiblement NE/SO qui indique le pertuis d’Antioche comme secteur d’action prioritaire de la batterie.
Les organes que nous venons de décrire, de par leur complexité, leurs dimensions, la technicité de leur équipement, dépassent largement l’habituelle rusticité des ouvrages allemands du mur de l’Atlantique et, malgré leur désarmement, présentent un intérêt certain pour l’histoire des techniques de construction et de l’architecture en général. Les batteries Kora et Karola ont été inscrites à l’inventaire supplémentaire des Monuments Historiques en juillet 2002.
Historique du Stüntzpunktgruppe Karola (Ro 429) :
L’occupation du fort de La Pallice par la Marine allemande et la construction très tôt d’une grande base sous-marine devait entraîner très rapidement la mise en état de défense, pour des nécessités évidentes de protection de cette base, des îles de Ré et d’Oléron. En outre, la position saillante de l’île de Ré et les bonnes possibilités de tir qui en découlent la prédestinait tout naturellement à l’implantation d’une batterie à longue portée comme les Allemands en ont installé sur divers points saillants de la côte.
Le groupe d’ouvrage constituant la batterie Karola fut construit entre 1942 et 1944 par l’armée allemande sur un site vierge. Elle est occupée par la 4e batterie de la MAA 282 sous les ordres de l’Oberstleutnant zur See Mazenburg qui regroupe près de 200 artilleurs. Chose étonnante elle partage le terrain avec l’armée de terre qui installe également sa plus grosse batterie du secteur nommée Kora (Ro 425). Ni attaqué, ni bombardé, Karola se trouvait comprise dans le «verteidungsbereich La Rochelle» lorsque, bloquée par les troupes françaises jusqu’au 8 mai 1945, la garnison allemande déposa les armes à la suite de la capitulation générale du IIIe Reich. Ses canons tirèrent sur cibles réelles une seule fois dans la nuit du 14 et du 15 août 1944, sur une flottille alliée qui croisait au large.
Restitués avec armement et matériel intact, les ouvrages ont été conservés tels quels pendant une quinzaine d’années, puis le matériel a été démonté et vendu comme vieille ferraille. Les bâtiments et le terrain d’emprise se trouvent toujours en domaine militaire de la Marine.
Situation et composition d’ensemble :
Le groupe d’ouvrages connu sous le nom de batterie Karola se trouve à 150m au NO du village d’Ars-en-Ré, et résulte du rassemblement d’organes affectés à des missions distinctes, à savoir :
- une batterie lourde de la Marine à deux tourelles doubles de 203mm C/34 d’une portée de 37 km. Cet ouvrage très rare est une combinaison de 2 Regelbauten Schwer 473 et 483.
- 4 canons français de 220mm Mle 1917 en cuves
- un poste d’éclairage formé par un 150mm TAC/36
- des ouvrages de défense rapprochée de la côte (ouvrages Kora).
- des ouvrages de défense antiaérienne (ouvrages Kathe).
- un garage, une écurie, 2 réfectoires cuisines, une infirmerie, un théâtre, un abri aumônerie, et même un bâtiment de la Gestappo comme semble l’attester une croix gammée dessinée dans le carrelage à l’entrée du bâtiment.
Ces ouvrages sont dispersés sur un terrain vague d’environ 35 ha compris entre le littoral et la N.735 ; ils étaient protégés, à l’origine, par des obstacles (champs de mines et réseaux de barbelés) et des organes de défense rapprochée sur tout le périmètre. L’ensemble comprend 19 blocs bétonnés actifs et passifs de protection variable (un poste de commandement et de direction de tir, 2 blocs-tourelle, quatre cuves de 220mm, 5 emplacements de type «tobrouk» ou similaires, 7 abris passifs), ainsi que des baraquements légers à usage de logement pour la garnison.
Poste de commandement et de direction de tir :
Cet ouvrage est implanté en retrait de prés de 500m des blocks-tourelles. C’est un bâtiment monolithique rectangulaire en béton armé, semi enterré, de 20 x 22 m, à un seul niveau, d’où émerge une tour d’observation également en béton, de 16.5m de haut (cuirassement exclus) et 7.5m de côté dans la partie courante.
La protection est de 2m pour la dalle, 2m pour les murs de fond, les murs latéraux et une partie de la façade de gorge, 1,5m pour les murs de tête de la caponnière de gorge. L’ouvrage est terrassé sur 3 côtés ; seule la façade de gorge reste dégagée et comporte en son milieu comme seule saillie de la caponnière.
Au rez-de-chaussée, les locaux sont répartis selon un plan en U renversé, autour du massif de base de la tour. Les deux branches du U, partant des deux entrées, sont constituées chacune par un couloir de circulation desservant une série de locaux à usage de chambres, bureaux, ect., au nombre de six à gauche et de6 à gauche et de 5 à droite. Le fond de l’abri (côté SO donc) est occupé sur presque toute sa largeur par la grande salle d’opérations (12,60 x 4,5m), où étaient suivis et reportés sur des cartes les informations transmises par la tour, les objectifs et leur route. On y élaborait également les éléments de tir qui étaient transmis aux tourelles.
A l’arrière, entre le massif de base de la tour et la caponnière, se trouvent les locaux de la centrale électrique (salle du Groupe,, réservoirs et la chambre de tir de la caponnière de gorge ; le tout n’est accessible que par une porte de communication ouvrant sur le vestibule de l’entrée de droite. Cette disposition judicieuse permettait au personnel du poste de commandement (graphiqueurs, téléphonistes, téléjointeurs, ect.) de ne pas être trop gênés par le bruit du groupe électrogène.
L’accès, depuis l’extérieur, à ce rez-de-chaussée se fait par deux entrées disposées symétriquement aux extrémités de la façade de gorge et flanquées à l’extérieur par les créneaux de la caponnière de gorge. Ces entrées, tracées en chicane, sont en outre prises chacune d’enfilade par un créneau de défense intérieure. On trouve en façade une porte grille et à l’intérieur, une porte blindée étanche.
Le poste de commandement proprement dit est surmonté d’une tour d’observation émergeant de la dalle de 16.50m, hauteur à laquelle il conviendrait d’ajouter les 2,5 à 3m de hauteur de la coupole du télémètre, aujourd’hui disparu, et les 4,8m de hauteur du rez-de-chaussée (2,8m de hauteur sous plafond, plus 2m en dalle), pour obtenir la hauteur totale : 23 à 24m, dont environ 19m émergeant.
Cette tour d’observation comprend trois parties :
Une première, de 13,8m (dont 4,8m pris dans l’abri comme embase), de plan carré aux angles arrondis, abrite la cage d’escalier à 5 niveaux. Ceux-ci sont constitués par 5 chambres palières-aveugles, reliées par des escaliers à trois volées droites, séparées par des repos et totalisant 74 marches. Cette première partie de la tour est protégée par des parois de 2m d’épaisseur. On notera que le raccordement des parois verticales de la tour avec la dalle de l’abri constitue un dièdre concave dangereux qu’il eût convenu d’amortir en pan coupé. Ajoutons enfin qu’il existe un forage d’eau au rez-de-chaussée de cette cage d’escalier.
Cette première partie porte un premier étage d’observation avec à l’avant une chambre demi-circulaire disposée en balcon saillant et percée d’un large créneau panoramique de surveillance de 50cm de haut sur 200° d’ouverture environ. A l’arrière se trouve un petit poste de guet auxiliaire avec créneau de 80cm d’ouverture et 20cm de haut. Ces deux locaux sont reliés à la chambre palière par des passages fermés par des portes blindées étanches.
Au-dessus se trouve un 7e niveau, auquel on accède par une échelle de meunier. Ce niveau est disposé en balcon saillant sur la face arrière de la tour. Il est constitué d’une chambre palière de 4x4m, prolongée à l’avant par un blockhaus saillant rectangulaire à deux niveaux, reposant sur la visière de la chambre de surveillance du 6e niveau (cette superposition de 2 étages saillants en porte-à-faux l’un à l’avant, l’autre à l’arrière, paraît correspondre à un souci de stabilité de l’édifice).
Ce blockhaus a ses parois en béton doublées extérieurement de plaques de blindage de 10cm d’épaisseur, et intérieurement de tôles sur fers. Il comporte trois créneaux d’observation cuirassés, un axial et deux latéraux. Le plancher et le plafond sont percés chacun d’un orifice cylindrique correspondant vraisemblablement à un périscope éclipsable à grande puissance.
Notons enfin qu’un passage cylindrique percé dans la dalle de bitume donne un accès à la plate-forme supérieure, qui portait à l’origine une coupole blindée tournante pour télémètre de 12m de base (grossissement 65) aujourd’hui disparu. A l’extrados de la dalle se voient encore les goujons de fixation de la sellette de la coupole.
Les blocs-tourelle :
Les 2 blocs-tourelle constituent l’artillerie principale de la batterie. Ils sont implantés dans la partie SO du terrain d’emprise, à 150m l’un de l’autre et à courte distance du rivage (200m pour le bloc X et 150m pour le bloc IX). Ils sont défilés aux vues du large par la dune littorale et il semble qu’ils ne faisaient que du tir indirect sur éléments transmis par le Poste de Direction de Tir, situé 500m en retrait.
Tous deux sont identiques et offrent l’aspect d’une construction monolithique en béton armé à 2 niveaux : un rez-de-chaussée terrassé et un sous-sol partiel. Chaque ouvrage est traité en variante de la protection A (3,5m de dalle, mais murs latéraux de 2m seulement) et dispose d’une autonomie complète en eau, électricité, ventilation, ect. Le plan assez complexe, est constitué dans les grandes lignes par trois rectangles accolés, chaque rectangle correspondant à un groupe de locaux répondant à une fonction spécifique :
- Accès, couloir central et services généraux (ateliers, puits...)
- Tourelle et soute à munitions
- Centrale électrogène, au N des précédents
Cette disposition a le désavantage de donner à la carapace bétonnée des parois verticales des dièdres rentrants guidant vers l’ouvrage les projectiles à trajectoire oblique, au lieu de les faire ricocher au loin. Il s’agit là, sans conteste, d’une faute technique de conception que les Allemands ont su éviter dans d’autres ouvrages.
L’accès, situé à l’extrémité SO de l’ouvrage, se fait par un passage en tranchée, aux parois bétonnées épaisses, qui est recouvert d’un plafond mince de tôles nervurées portant une mince couche de terre de camouflage. Ce plafond est incliné et se raccorde à la pente du talus du massif de terre enveloppant le bloc. La tranchée pénètre dans l’ouvrage par un vestibule extérieur qui se trouve pris en enfilade par les 2 créneaux pour arme automatique de la caponnière, et aboutit de plain-pied à la porte blindée après une brisure d’alignement destinée à masquer aux vues de l’extérieur la dite porte. Celle-ci donne accès à un large couloir central de 12,5 x 2,8m qui dessert :
- à gauche, quatre locaux de servitude (atelier, magasin, chambre du puits d’eau...)
- à droite, la caponnière d’entrée, la centrale électrogène et ses annexes
- au fond, un dégagement donnant accès aux locaux de la tourelle, l’escalier menant au sous-sol et deux locaux de servitude.
La centrale électrogène comprend 4 pièces :
- La salle des machines proprement dite avec le socle du groupe, le tableau, le jeu de barres et les accessoires
- Une petite chambre, au fond de la salle du groupe, à usage des réservoirs d’eau de refroidissement
- Un local abritant l’aérorefroidisseur, avec, dans les parois, les orifices de départ des trois cheminées correspondant à l’échappement, à l’aspiration et au refoulement de l’aérorefroidisseur
- Un local, isolé des trois autres, correspondant au réservoir à combustible
Les tourelles comprennent, à chaque niveau, trois locaux en alignement et semblablement disposés, à savoir :
- Au centre, les puits de la tourelle, local sensiblement carré de 5x5,5m se prolongeant à travers la dalle par un orifice cylindrique de 5,4m de diamètre servant de passage du pivot du cuirassement, orifice actuellement à l’air libre, mais à l’origine recouvert par la cage de la tourelle. Au rez-de-chaussée un plancher reposant sur des laminés scellés dans le béton séparait l’étage intermédiaire de l’étage inférieur. On notera qu’à sa partie supérieure, le puits de tourelle dépasse la dalle du bloc de 2m. Cette émergence porte un rétrécissement correspondant au guidage supérieur du pivot, puis un élargissement correspondant au logement du blindage annulaire jouant le rôle d’avant-cuirasse. La tourelle elle-même a disparu. On sait qu’il s’agissait d’une tourelle tournante type Marine, armée de pièces de 203mm provenant du désarmement du croiseur «Seydlitz» alors en construction. De part et d’autre du puits de la tourelle, et séparés de celui-ci par des piédroits de 1cm d’épaisseur percés chacun d’une porte et de deux guichets de distribution se trouvent les soutes à munitions, vastes locaux de 5,3x5,35m. On notera qu’à chaque niveau les portes faisant communiquer les trois locaux (soute et puits de tourelle) sont placées exactement dans le même alignement, mais qu’elles sont décalées d’un niveau sur l’autre. D’autre part, du fait de l’enlèvement des parties métalliques et du plancher, et du noyage par les eaux de pluie de l’étage inférieur, on ne peut plus accéder partout et déterminer certains détails, tels que l’affectation exacte des soutes (obus et gargousses) l’organisation de la sellette de base du pivot.
- Chaque bloc est pourvu d’un puits d’eau de 80cm de diamètre foré dans des locaux de gauche au rez-de-chaussée.
- La ventilation comportait la bouche de prise d’air, rectangulaire, au-dessus de la porte d’entrée et un réseau de gaines d’amenée et de distribution.
- Dans un local du rez-de-chaussée, on remarque encore les restes de la climatisation avec, sur le circuit de ventilation, une batterie de chauffe électrique et une batterie de chauffe alimentée par l’eau de refroidissement du groupe. Il est vraisemblable que la ventilation comportait un système de filtration des gaz toxiques.
- Le logement du personnel est réparti dans les divers locaux (couchettes métalliques rabattables).
- Une voie de 60cm scellée dans le béton du sol court dans la tranchée d’accès et le couloir central. Elle permettait d’amener le matériel et les munitions jusqu’aux locaux de la tourelle.
- Conformément aux traditions de la Kriegsmarine, l’un des blocs tourelle était baptisé « Anton » et le second « Bruno » (relevé sur le marquage d’accessoires trouvés dans les locaux).
Conclusion :
En fait, conçue par des marins, la batterie Karola, avec ses 2 blocs-tourelle, ses 4 cuves circulaires pour canon de 220mm, ses abris à personnel et munitions, et munitions, son blockhaus et sa tour de télémètre, évoque l’image d’un croiseur de bataille enfoui dans le sol et dont les différents éléments auraient été dispersés sur le terrain pour compenser la vulnérabilité résultant de la fixité.
On fera d’autre part remarquer que, bien que les tourelles tournantes de tir soient à révolution totale (de même que la coupole du télémètre), les chambres de vieille et blockhaus-observatoires des sixièmes et septième niveaux sont axés sur une capitale orientée sensiblement NE/SO qui indique le pertuis d’Antioche comme secteur d’action prioritaire de la batterie.
Les organes que nous venons de décrire, de par leur complexité, leurs dimensions, la technicité de leur équipement, dépassent largement l’habituelle rusticité des ouvrages allemands du mur de l’Atlantique et, malgré leur désarmement, présentent un intérêt certain pour l’histoire des techniques de construction et de l’architecture en général. Les batteries Kora et Karola ont été inscrites à l’inventaire supplémentaire des Monuments Historiques en juillet 2002.
Panzer5- Général de Division
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Localisation : Charente maritime
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Re: Batterie Karola
Plus un lien vers d'autres photos:
https://deuxiemeguerremondia.forumactif.com/viewtopic.forum?t=549&postdays=0&postorder=asc&start=0
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Date d'inscription : 29/08/2005
Re: Batterie Karola
Post très complet, génial
greytwo- Général de Division
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Date d'inscription : 26/09/2006
Re: Batterie Karola
du plus avec des spécialistes :
http://atlantikwall.superforum.fr/Vendee-et-Charente-f28/KORA-KAROLA-t391-0.htm
FX
http://atlantikwall.superforum.fr/Vendee-et-Charente-f28/KORA-KAROLA-t391-0.htm
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Franxerox- Adjudant
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Localisation : Remiremont (88)
Date d'inscription : 12/08/2006
Re: Batterie Karola
rhaa Panzer5, tu m'as trahis!!! tu as quittés la panzerwaffe pour te convertir dans la défense fortifié... enfin, si c'est pour nous pondre des articles aussi riches alors je vais fermer les yeux...
Charlemagne- Police militaire (Modérateur)
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Date d'inscription : 11/02/2006
Re: Batterie Karola
Reportage intéressant.
Mais attention, vous exposez bien la situation dans l'historique, mais après vous faites l'amalgame, en parlant de batterie Karola.
Si pour les réthais, le poste de tir type S497 est la tour Karola, comme vous l'expliquez bien dans l'historique, la position était composé de 2 batteries:
Le Stüntzpunktgruppe ro429M Karola batterie de la kriegsmarine avec les deux tourelles double de 20,3cm SKC/34 qui proviennent de l'ex-croiseur Seydlitz désarmé.
Le Stüntzpunktgruppe ro425H Kora avec 4 canons français de 22cm K532(f) Schneider mdl 1917 en encuvements, désignée HKB 2/746 jusqu'au 1er décembre 1943 puis 2/HKAR 1280 (2e batterie du 1280e régiment d'artillerie côtière de l'armée de terre).
Concernant la tour de direction de tir de type Schwer 497, sachez qu'il s'agit du seul exemple connu d'une télémétrie mixte Heer et Kriegsmarine.
Le cinquième étage de la tour (6ème pour vous) sert d'observatoire et de salle de télémétrie pour la batterie Kora avec un télémètre et deux binoculaires d'observation.
Le sixième étage est utilisé par l'artillerie de marine pour la batterie Karola avec, au niveau intermédiare, un périscope sous cabine et au somment un télémètre Zeiss de 11 mètres placé sous coupole semi-sphérique pouvant balayer tout l'horizon.
Enfin la position comprend un dernier Stüntzpunktgruppe, le ro424 Kathé situé sur la plage et visant à défendre les batteries contre toutes tentatives de débarquement.
Il comprend un canon de 4,7cm Pak 181 (f), deux pièces de 5cm KWK L/39 en tobrouk et deux canons antiaériens de 2cm Flak 30 protégeant un radar de recherche sur buts marins Seeriese FuMO 214 monté sur assise octogonale.
En 1943, la position est étoffée par l'arrivée d'une unité de Flak provenant de Saint-Martin (2/MaFlA 812) aux ordres de l'Oberleutnant Hans Kock. Elle prend position avec 4 pièces de 7,5cm Flak M 35 (h). Pour assurer la conduite du tir, un télémètre et un radar Wûrzburg Anton 39 t (d) complètent le dispositif.
Informations tiré du livre Charente-maritime Vendée 1939-1945 de A. Chazette, Fabien Reberac et Eric Brothé.
Mais attention, vous exposez bien la situation dans l'historique, mais après vous faites l'amalgame, en parlant de batterie Karola.
Si pour les réthais, le poste de tir type S497 est la tour Karola, comme vous l'expliquez bien dans l'historique, la position était composé de 2 batteries:
Le Stüntzpunktgruppe ro429M Karola batterie de la kriegsmarine avec les deux tourelles double de 20,3cm SKC/34 qui proviennent de l'ex-croiseur Seydlitz désarmé.
Le Stüntzpunktgruppe ro425H Kora avec 4 canons français de 22cm K532(f) Schneider mdl 1917 en encuvements, désignée HKB 2/746 jusqu'au 1er décembre 1943 puis 2/HKAR 1280 (2e batterie du 1280e régiment d'artillerie côtière de l'armée de terre).
Concernant la tour de direction de tir de type Schwer 497, sachez qu'il s'agit du seul exemple connu d'une télémétrie mixte Heer et Kriegsmarine.
Le cinquième étage de la tour (6ème pour vous) sert d'observatoire et de salle de télémétrie pour la batterie Kora avec un télémètre et deux binoculaires d'observation.
Le sixième étage est utilisé par l'artillerie de marine pour la batterie Karola avec, au niveau intermédiare, un périscope sous cabine et au somment un télémètre Zeiss de 11 mètres placé sous coupole semi-sphérique pouvant balayer tout l'horizon.
Enfin la position comprend un dernier Stüntzpunktgruppe, le ro424 Kathé situé sur la plage et visant à défendre les batteries contre toutes tentatives de débarquement.
Il comprend un canon de 4,7cm Pak 181 (f), deux pièces de 5cm KWK L/39 en tobrouk et deux canons antiaériens de 2cm Flak 30 protégeant un radar de recherche sur buts marins Seeriese FuMO 214 monté sur assise octogonale.
En 1943, la position est étoffée par l'arrivée d'une unité de Flak provenant de Saint-Martin (2/MaFlA 812) aux ordres de l'Oberleutnant Hans Kock. Elle prend position avec 4 pièces de 7,5cm Flak M 35 (h). Pour assurer la conduite du tir, un télémètre et un radar Wûrzburg Anton 39 t (d) complètent le dispositif.
Informations tiré du livre Charente-maritime Vendée 1939-1945 de A. Chazette, Fabien Reberac et Eric Brothé.
titus17- Soldat 1ère classe
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