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La Phalange africaine.

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Message  tietie007 4/7/2007, 11:07

Source : Volontaires français sous l'uniforme allemand, de Pierre Giolitto, éditions tempus 2007 (Perrin 1999). Chapitre 8, L'éphémère phalange africaine, p 283 à 323.

PELLEGRIN R. – La phalange africaine, la LV.F. en Tunisie – Paris, 1973, 217p

Les passages entre-parenthèses et précédés par un *, sont mes réflexions personnelles. Les liens ont été ajoutés par moi-même pour illustrer l'article. J'ai découpé l'article en paragraphe pour faciliter sa lecture.

1) Génèse de la Phalange africaine.

Lors de l'opération Torch, qui voit les alliés débarquer en Afrique du Nord, si le Maroc et l'Algérie cèdent rapidement, la Tunisie, sous le commandement de l'amiral Esteva, un inconditionnel du Maréchal, va résister.
Laval, dès le 20 novembre 42, va cautionner, dans un discours radiodiffusé, le projet de création d'une "Phalange africaine", destinée à défendre la Tunisie, future cible des alliés.

Les volontaires seraient rassemblés au camp de Rivesaltes, sous le commandement du colonel Puaud.

http://www.1939-45.org/bios/puaud.htm

La Phalange africaine. Puaud

Ce projet mirifique, La Phalange africaine. Laval s'empresse de le communiquer aux allemands. Le 12 janvier 1943, il écrit au maréchal von Runstedt, commandant en chef du front de l'Ouest :

"Il ne s'agit pas seulement de participer à la défense du territoire et d'alléger ainsi la tâche qui incombe, en France, aux troupes germano-italiennes. Il convient également d'assurer la sauvegarde de l'Empire. (...) Elle pourrait comprendre deux brigades d'environ 7 000 hommes chacune et une demi-brigade de 3 000 à 4 000 indigènes nord-africains. Cette formation française de 18 000 hommes constituerait initialement la participation française à la reconquête de l'Afrique du Nord." (*Laval avance des chiffres un peu fantaisistes, je ne pense pas que l'auvergnat soit dupe sur le futur "échec" au niveau du recrutement de cette Phalange.)

Malgré tous ces beaux discours, aucun texte législatif ni réglementaire ne vient formaliser la création de cette nouvelle unité. (*Pétain n'a jamais vraiment cautionné ce genre d'unités, il était contre une co-belligérance officielle ! Ce fut d'ailleurs le caus, aussi, pour la LVF. Les allemands allaient dans ce sens, pour éviter la renaissance de l'armée française.).
Il est prévu que les volontaires soient rassemblés à Guéret, sous le commandement du colonel Puaud.
La campagne de recrutement s'avérant un échec monumental, l'OKW intervient en arguant des difficultés de transport pour rejeter l'envoi d'un corps expéditionnaire français en Tunisie (*Toujours la méfiance des allemands envers la reconstitution d'une unité militaire française.). Tout au plus accepte-t-il qu'une troupe de volontaires soit levée dans le pays. Les allemands se déclarent favorable à l'envoi d'une mission militaire française, chargée d'aller recruter et organiser, sur place, une phalange de volontaires tunisiens.
Le colonel Puaud confie au commandant Cristofini, aussitôt nommé lieutenant-colonel, la responsabilité de la Mission militaire mise en place par le secrétaire d'Etat à la Guerre, après avoir été autorisée par les allemands.
Pour Henry Charbonneau ( sur Charbonneau voir le lien de Wiki
http://fr.wikipedia.org/wiki/Henry_Charbonneau )

, également membre de la Mission, Cristofini est "un Corse peu subtil et un rien illuminé". Travaillé, en outre par un très fort "complexe Napoléonien". Dès son arrivée à Tunis, Cristofini prend en effet soin de se procurer du papier à en-tête : "Forces Européennes, Phalange Africaine."
Le commandant Curnier, ancien SOL de Nice, est l'adjoint du Corse. Fait partie aussi de la Mission le lieutenant-colonel Sarton du Jonchay.
Charbonneau assure que Sarton de Jonchay est un "personnage extraordinaire", et La Gerbe (*Fameux journal collaborationniste français fondé par l'écrivain pro-nazi Alphonse de Châteaubriant) rappelle qu'il "appartient à la génération des grands bledards". Petit-fils d'un "saint-guerrier, en cours de cannonisation", le général Gaston de Sonis, qui a combattu au Maroc et en Algérie, avant d'être placé par Gambetta, en novembre 1870, à la tête du 17e corps d'armée.

http://fr.wikipedia.org/wiki/Gaston_de_Sonis

Lors de la déclaration de guerre en 1914, du Jonchay n'a que quinze ans. Déguisé en arabe, il parvient à se faire engager et part sur le front.

Partie de Vichy le 27 décembre 1942, la Mission, après une escale à Rome. Sa tâche sera de recruter des volontaires pour combattre les ennemis de la France et de l'Axe.

2) La Mission militaire en Tunisie.

Les collaborationnistes sont particulièrement actifs en Tunisie. Leur chef est un certain Georges Guilbaud, ancien communiste ayant quitté le parti en 1938, après avoir participé au ravitaillement en armes des républicains espagnols. Membre du PPF depuis 1941, il sera considéré en Tunisie comme le "personnage type des jeunes français de la Révolution Nationale." (*Toujours ces vases communicants entre l'extrême-gauche et l'extrême-droite ! Le Bureau du PPF était composé, à un moment, d'une majorité d'anciens communistes, dont le secrétaire général Victor Barthélémy, futur fondateur du FN avec Le Pen, et par un ancien secrétaire général du PC, Henri Barbé !!)

Lorsqu'il arrive en Tunisie, Guilbaud crée, le 5 janvier 1943, une sorte de Comité de salut public, dénommé Comité d'Unité d'Action Révolutionnaire (CUAR). Ce mouvement dont il assure la présidence, comprend les chefs des "grandes organisations nationales françaises", soit Jean Serdane, chef du PPF, (*Le PPF était extrêmement actif en Afrique du Nord. C'était une des fédérations les plus importantes du mouvement.) Jean Saint-Martin chef de la Légion des combattants, Pierre Lacomme, chef du SOL. Au total, le CUAR rassemblera un millier de militants décidés, essentiellement issus du PPF.
Ce Comité va surtout conseiller le gouvernement du Protectorat et Guilbaud, ne va pas tarder à par-dessus la tête du maréchaliste amiral Esteva pour diriger la Tunisie (* L'un est un collaborationniste issu de la mouvance des partis fascisants, l'autre est un maréchaliste qui s'inscrit dans une collaboration d'Etat. La distinction des deux types de collaboration est consacré par l'historien communiste Yves Durand dans La France dans la seconde guerre mondiale, Armand Collin, 2001).
D'ailleurs les relations vont vite être tendues entre les deux hommes !
Malgré tout, la Mission militaire française, appuyée par le CUAR, essaie de mener à bien ses deux missions :
- ramener dans l'orbite vichyste, les militaires qui avec le général Barré se sont ralliés à la cause alliée.
- recruter des volontaires pour la Phalange africaine.

Les appels de l'amiral Esteva en février 43 vers les militaires français pour revenir dans le bercail vichyste vont faire chou blanc. L'échec est patent ! Robert Aron assure que Cristofini s'en est même allé ramasser dans les rues de Tunis "150 va-nu-pieds, syphilitiques et avariés de toute espèce, qu'il a attirés en leur offrant un bon repas et de l'argent" ! La moitié des recrues, ajoute-t-il, est composée d'indigènes ou d'aventuriers peu sûrs, qui prendront le large dès la première occasion.

Le nombre de volontaires engagé dans la "Légion Impériale" est difficile à déterminer. Charbonneau parle de 400 ou 450 hommes, Robert Aron parlera de 300 hommes. Lors du procès de l'amiral Esteva, le nombre de 120 sera évoqué.
La Phalange africaine ne sera jamais, pour Pascal Ory, qu'une "compagnie croupion", réplique peu flatteuse de la LVF.

3) La Französische Freiwilligen Legion.

La Phalange française est intégrée, sous le nom de Frankonia, à la 754e division de panzers grenadiers, placée sous les ordres du général-major Weber, qui tient une partie du front de Medjez el Bab. Elle comprend 5 sections, 3 de fusiliers, une section lourde, avec 3 mitrailleuses Hotchkiss, deux mortiers de 60, trois canons antichars de 17 et une section d'approvisionnement.

Cristofini ayant été blessé lors d'un exercice antichars, le 23 janvier 43, le commandant Curnier le remplace à la tête de la Mission. Quant à la Phalange, elle sera placée sous les ordres d'un vieux de la vieille de 14-18, le capitaine de réserve André Dupuis. Les volontaires de la Phalange sont rassemblés à la caserne de Forgemol, à Tunis, ils porteront l'uniforme des fantassins français. A la veille de leur montée en ligne, les phalangistes sont dotés d'une capote allemande, de brodequins allemands et du casque d'acier de l'armée allemande, plus résistance que la modeste bouquignotte française. En contrepartie de cette concession, les volontaires portent une cocarde tricolore sur le casque et sur la poitrine, un écusson de tissu bleu noir sur lequel figure une francisque "à double tranchant de métal doré".
Le 2 février 43, la compagnie quitte Tunis pour le camp d'entraînement de Cedria Plage.

4) La Phalange monte en ligne.

Le 18 mars, les phalangistes prêtent serment à Hitler, et le 10 avril, la Phalange montera enfin en ligne. Sa mission est de relever une unité allemande établie le long d'un front de quelque 1800 mètres, au nord de Medjez el Bab.[/b]

http://fr.wikipedia.org/wiki/Medjez_el-Bab

Le premier affrontement avec les troupes britanniques se déroule dans la nuit du 16 au 17 avril. Une section de reconnaissance commandée par le sergent-chef Lhorens, est attaquée par une patrouille anglaise composée d'Hindous et de Néo-zélandais. Les français parviennent à mettre l'ennemi en fuite, après avoir fait des prisonniers et récupéré du matériel. Ce mini-exploit des phalangistes est monté en épingle par les allemand. Le général Weber le cite dans son ordre du jour du 19 avril.
Une semaine plus tard, les choses sérieuses commencent. Les alliés après un sévère pilonnage d'artillerie passe à l'offensive. Les phalangistes, assurent le commandant Curnier, sont 300 face à 110 chars ennemis. La bataille se termine par un "sanglant corps à corps", et en une heure, [u]la Phalange perd plus de 100 morts ou disparus. Le front fait un bond en arrière d'une dizaine de kilomètres. En tant qu'unité combattante, la Phalange a vécu.



Début mai, Dupuis regroupe les phalangistes à la caserne Faidherbe où ils sont démobilisés. La "Frankonia" est dissoute.

5) Instrumentalisation de la Phalange et destin des acteurs.

De retour en France, les rescapés de la peu glorieuse opération tunisienne sont fêtés, décorés, reçus comme des héros. Mais avant d'attribuer à la glorieuse Phalange les médailles qu'elle mérite, encore convient-il de lui donner une existence légale, ce qui paradoxalement, n'avait pas encore été fait. Le 5 mai 1943, la "Première Phalange Africaine" est officiellement reconnue et rattachée à la LVF. (...) Une loi parue au Journal officiel du 20 mai 1943 assimile les phalangistes, avec tous les avantages y afférents, aux volontiares de leur glorieuse aînée. (*Lorsque l'unité n'existe plus, les autorités allemandes et vichystes peuvent accepter qu'elle soit reconnue puisqu'elle ne représente plus une menace ! Il faut savoir aussi, que Laval craignait ces unités comme la LVF ou la Phalange, unités instrumentalisées par le PPF, en qui il voit un potentiel concurrent très dangereux pour sa place !)

Le 18 mai 43, le Petit Parisien

(http://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Petit_Parisien)

annonce que "7 français sont condamnés à mort par Giraud". Par contumace, car ils ont su prendre le large. Parmi ces condamnés, Guilbaud devait émigrer en Amérique du Sud.
Sarton du Jonchay devait se réfugier en Argentine, puis en Espagne, avant d'être grâcié.
Le commandant Curnier devait être arrêté par les Allemands et incarcéré à Nice où, le 8 mai 1945, il se suicidera dans sa cellule.
Cristofini ayant regagné l'ïle Rousse dont il était originaire, fut arrêté lors du débarquement en Corse. Transféré à Alger, jugé par un tribunal militaire et condamné à mort, il sera exécuté au Polygone d'Hussein Dey, le 3 mai 1944, sur une civière, après une défenestration qui ne l'avait pas tué ! L'éxécution de Cristofini fit un scandale dans la mouvance collaborationniste. Le Maréchal lui-même monte au créneau faisant remarquer que les combattants de Tunisie "n'ont fait qu'obéir aux ordres de leur chef."
L'amiral Derrien accusé d'avoir livré le port de Bizerte aux allemands, est traduit devant le tribunal militaire d'Alger du 9 au 12 mai 1944. L'amiral se défend en arguant qu'il n'a fait qu'éxécuter les ordres de Vichy. La peine de mort sera évitée pour sauver des résistants des Glières, dont le sort était soumis à la sentence contre Derrien. Aussi, le "félon" bénéficiant des circonstances atténuantes, s'en sortit avec la réclusion criminelle à perpétuité. Il devait décéder à la centrale de Lambèse, située sur les hauts plateaux constantinois.
Le 12 mars 1945 s'ouvrira, devant la Haute Cour de justice à Paris, le procès de l'amiral Esteva. Reconnu coupable de trahison, au terme de l'article 75 du code pénal, parce qu'il a aidé la communauté juive de Tunisie, fait libérer des patriotes avant l'arrivée des troupes de l'Axe et facilité le départ de fonctionnaires compromis avec les Allemands, l'amiral sauvera sa tête, mais il sera condamné, le 15 mars, à la détention pérpétuelle. Libéré après 6 mois de prison, il décèdera peu de temps après.
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Message  Charles Delifox 4/7/2007, 19:53

Bonjour Titie et merci pour cet exposé synthétique et très clair sur cette unité méconnue.

A part les deux sources citées, il me semble qu'il y a assez peu de documents sur cette phalange, faut dire aussi qu'il n'y pas non plus grand chose à en dire compte tenu de sa durée de vie et de son action...celà donne néansmoins envie d'en savoir plus sur ces unités croupions.

Cordialement

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Message  tietie007 5/7/2007, 10:56

Source d'un forumeur, sur un autre site :

De cette "troupe", celui qui s'en sortit le mieux fut sans doute Guilbaud qui, réfugié en Argentine, devint conseiller administratif du président Juan Peron. Par la suite il travailla en Suisse dans "les affaires".
Il fut le mari de Maud Sacquard de Belleroche, romancière "pour adultes" (L'Ordinatrice) qui a rédigé des souvenirs décoiffants sur Sigmaringen (Le Ballet des Crabes) et a écrit une bio admirative d'Eva Peron.


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Message  tietie007 5/7/2007, 12:17

tietie007 a écrit:Source d'un forumeur, sur un autre site :

De cette "troupe", celui qui s'en sortit le mieux fut sans doute Guilbaud qui, réfugié en Argentine, devint conseiller administratif du président Juan Peron. Par la suite il travailla en Suisse dans "les affaires".
Il fut le mari de Maud Sacquard de Belleroche, romancière "pour adultes" (L'Ordinatrice) qui a rédigé des souvenirs décoiffants sur Sigmaringen (Le Ballet des Crabes) et a écrit une bio admirative d'Eva Peron.


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Alors les sources de ces infos d'après l'internaute Nicolasb, qui sévit sur un autre forum Histoire :

Dans sa biographie sur "Eva Peron", 1972, La Jeune Parque, Maud raconte, au début de son livre qu'elle s'est retrouvée en Argentine avec son époux Georges Guilbaud, "réfugié politique pétainiste" (génial euphémisme ! )
Et la notice biographique dudit Guilbaud dans "Histoire de la Collaboration" de Dominique Venner, Pygmalion, 2002, ouvrage certes "orienté" mais passionnant pour ses précisions sur un tas de "seconds couteaux".

Un sacré client ce Guilbaud ! Communiste jusqu'en 1938, rejoignant l'ultra-collaboration au sein du PPF, organisateur de la Phalange Africaine, puis exilé en Argentine, conseiller de Peron, et marié avec une femme qui écrivait des livres érotiques ! mort de rir gri Une vie comme on n'en fait plus !
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Message  Charles Delifox 5/7/2007, 19:50

Encore des informations très intéressantes, ne t'arrêtes pas et continue sur les seconds couteaux, on en redemande oui gri

Cordialement

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Message  lebel 15/9/2009, 00:43

Bonsoir
Il y peu de documents " collabo "sur cette unité , à part la relation qu'en a fait l'ex volontaire et milicien Charbonneau dans " Les mémoires de Porthos "
Je viens de retrouver cet extrait d'un livre de R Pellegrin , que P. Ory avait qualifié de " chantre énamouré de la Phalange Africaine "
Il vaut son pesant de cacahuètes comme plaidoyer pour Vichy et la Collaboration '
( mensonges et contre vérités incluses )




La Phalange africaine (par René Pellegrin)



Un épisode peu connu du front tunisien en 1942 : La LVF en Tunisie 1942-1943, La Phalange Africaine, par René Pellegrin.


Lors du débarquement anglo-américain du 8 novembre 1942 sur les côtes d’Afrique du Nord, les troupes françaises de « l’armée Weygand » s’opposèrent par les armes aux envahisseurs. Les combats durèrent trois jours et trois nuits jusqu’à la signature – le 11 novembre – d’un armistice puis d’un accord conclus entre l’amiral Darlan – présent à Alger – et les autorités américaines.
En Tunisie le général Barré choisit cette date du 11 novembre 1942 pour se retirer avec ses troupes sur la dorsale tunisienne, à plus de 50 kms des côtes, abandonnant ainsi Bizerte, Tunis et les grands ports du sud aux troupes italo-allemandes qui débarquèrent dans le même temps.
L’amiral Esteva, résident général de France en Tunisie, investissait aussitôt le Service d’Ordre légionnaire comme force du maintien de l’ordre dans toute la partie de la Régence abandonnée par les troupes du général Barré. Son rôle consiste en la surveillance des casernes et des installations militaires, la protection des fermes et domaines menacés par des bandes de pillards, le fonctionnement ou la surveillance des centrales électriques, téléphoniques, réservoirs et barrages, routes et ponts.

Le 15 novembre 1942, soit une semaine après le débarquement, les troupes de l’armée d’Afrique passaient tout entières sous contrôle anglo-américain. Il n’était pas exclu toutefois – des témoignages le prouvent – que parmi les forces françaises de nombreux officiers et hommes de troupes conservaient leur fidélité à la Révolution Nationale et à son cher le maréchal Pétain. Dans la population de l’Algérie et du Maroc cet esprit s’exprimait ouvertement et, malgré leur mobilisation – mesure abusive – les maréchalistes gardaient l’espoir d’un renversement immédiat de la situation militaire (outre les unités allemandes et les unités italiennes venant d’Italie et occupant le territoire de la Tunisie du nord, les éléments intacts de l’armée Rommel refluant de Tripolitaine prenaient position dans les territoires du sud tunisien) et, à la faveur de celui-ci, reprendra ce qu’ils estimaient être le véritable bon combat. Des maquis même – avant que le mot ne connût la fortune qui devint la sienne par la suite – s’étaient constitués en Oranie, au Maroc, dans l’Algérois et le Constantinois, ce qui eut pour effet l’arrestation de toutes les vedettes maréchalistes : chefs légionnaires, S. O. L. et militants endurcis du Parti Populaire Français, par les services spéciaux de police de l’armée giraudiste.
Sur la dorsale tunisienne, le général Barré, en accord avec les généraux Juin et Giraud et l’amiral Darlan, déclarait la guerre aux troupes de l’Axe le 20 novembre 1942. Cette décision était prise contre la volonté du maréchal Pétain, chef de l’Etat, qui avait ordonné dès le 8 novembre de résister contre l’envahisseur anglo-saxon en se rangeant aux côtés des troupes de l’Axe. Les jours suivants, par la voie radiophonique, par des messages à l’amiral Esteva, résident général et à l’amiral Derrien, commandant la place de Bizerte, enfin par l’envoi à Tunis même et sur le front – où les troupes du général Barré cantonnaient – de son ministre d’Etat l’amiral Platon, il réitérait formellement cette consigne.

A Paris, le 9 novembre 1942, à l’issue de son « Congrès du Pouvoir » le Parti populaire français par la voix de son chef Jacques Doriot, combattant du front de l’Est et l’un des fondateurs de la Légion des Volontaires français contre le bolchevisme en 1941, réclame l’ouverture des hostilités contre les Anglo-Américains. Ses militants doivent désormais se considérer comme mobilisés.

A Vichy, le 22 novembre 1942, le Président Lavai annonce la création d’une Légion Impériale ouverte à tous les volontaires pour combattre l’envahisseur anglo-saxon en Afrique du Nord. Dans toute la zone libre – qui ne l’est plus en fait depuis le 11 novembre : les troupes allemandes ayant franchi en force la ligne de démarcation et gagné les Pyrénées et les côtes de Provence ainsi que la Corse – des bureaux d’enrôlement sont ouvert et rapidement enregistrent trois milliers de signatures de contrat d’engagement. Mais des problèmes d’acheminement par la Wehrmacht sur le théâtre d’opération : transport des unités, protection maritime et aérienne des convois, interdiront la venue en Tunisie de ce corps de volontaires.

Après l’échec de la mission Platon (retour du général Barré dans le camp loyaliste), le président Laval déléguait à Tunis, fin novembre 1942, Georges Guilbaud, du ministère de l’Information et de la Propagande avec mission de soutenir le Résident général dans l’esprit de résistance à la dissidence, tandis que le général Bridoux, secrétaire d’Etat à la Guerre, détachait dans la Régence, le 28 décembre 1942, une Mission Militaire française composée d’officiers d’active. Cette mission était chargée : 1° de prendre en main les éléments de l’armée Barré abandonnés dans les casernements à la suite du retrait de ce général. 2° de ramener à l’obéissance et à la fidélité aux pouvoirs légitimes de l’Etat français les troupes emmenées de force en dissidence. 3° de constituer sur place des unités françaises volontaires pour se battre aux côtés des troupes de l’Axe. Du succès de cette mission dépendait le maintien des droits de souveraineté de la France en Tunisie.
« Maquis » algériens et marocains, et soldats et officiers dissidents malgré eux ne furent pas totalement oubliés par les maréchalistes de la Métropole puisque, une bonne centaine de volontaires : officiers de la L.V.F., militants du P.P.F., armés et équipés de matériel de combat, de radio et de propagande furent parachutés ou débarqués au Maroc et en Algérie, certains (comme le fils du colonel commandant la gendarmerie à Alger, parachuté depuis Tunis) dans le Constantinois, derrière les lignes secondaires du front durant la campagne de Tunisie, et même au-delà puisque en juin et juillet 1944, des parachutages de jeunes P.P.F. avaient encore lieu sur l’Algérie !.

La fondation du Comité d’Unité d’Action Révolutionnaire (C.U.A.R.) par le délégué du ministère de l’Information Georges Guilbaud, fut la plus belle réussite « Révolution nationale » de toute la guerre. L’action du C.U.A.R. s’exerça dans tous les domaines : politique, social, économique, culturel, militaire. Elle s’étendit sur six mois jusqu’au mois de mai 1943 et mit à son actif, outre la résolution des problèmes vitaux du ravitaillement, de l’éclairage électrique, des transports, de la défense passive et le fonctionnement de l’administration en général, sur le plan culturel : la refonte du quotidien Tunis-Journal, la reprise des émissions de Radio-Tunis, l’institution d’une Ecole des Cadres révolutionnaires sur le plan de la sécurité et de l’ordre, la mobilisation effective du S.O.L. et la création. du C.O.S.I. ou Comité ouvrier de secours immédiat qui renforçait l’action du Secours national, et l’attribution de pouvoirs étendus aux compagnons et aux scouts ainsi qu’aux légionnaires anciens combattants pour la surveillance et la sauvegarde des fermes et des récoltes, l’accueil des réfugiés des zones bombardées, les déblaiements, évacuations, premiers soins, regroupements. etc. enfin sur le plan militaire, le parrainage de la Phalange africaine – premier maillon de la future Légion Impériale.
Au mois de janvier 1943 ; la détermination des milieux gouvernementaux et révolutionnaires français qui se traduisait par des actes concrets sur le sol tunisien : création du C.U.A.R., organisation de la Phalange, eut une conséquence des plus heureuses : les unités de « malgré eux »faites prisonnières par les Allemands sur le front tunisien : plusieurs centaines d’hommes, furent traités sur ordre du Führer, non en francs-tireurs (il y avait rupture des clauses de l’armistice franco-allemand, ne l’oublions pas), mais comme des victimes des envahisseurs anglo-américains et rapatriées sur la France à Montauban par la Wehrmacht. Les prisonniers originaires de Tunisie colons ou citadins de même que les « pieds-noirs » d’Algérie et du Maroc, restant dans la Régence avec leur accord.
Le 5 janvier 1943, le lieutenant-colonel Sarton du Jonchay, chef de la Mission Militaire était nommé directeur du cabinet du Résident général, assurant ainsi la liaison, d’une part avec le secrétariat d’Etat à la Guerre et le gouvernement du Maréchal, par l’entremise de l’amiral Esteva, d’autre part avec la délégation militaire par le truchement du lieutenant-colonel Cristofini qu’assiste le commandant Curnier. En outre Sarton du Jonchay devait assumer un rôle diplomatique important tant auprès du bey de Tunis, Mohamed el-Moncef, qu’auprès du ministre allemand Rahn et du ministre italien Bombieri.

Le 8 janvier 1943, enfin, soit moins de deux semaines après l’arrivée à Tunis de la Mission française, la Phalange africaine voit le jour. Elle comprendra un peu plus de trois cents volontaires français qu’épauleront près de cent cinquante autres volontaires musulmans. Cette formation aurait pu sans peine compter dix fois plus d’éléments mais les membres actifs des organismes politiques et paramilitaires et policiers de la Régence : Légion française des Combattants, Compagnons de France, Scouts de France, Défense passive, Parti populaire français, Brigade de Surveillance du Territoire, marins et officiers de la place de Bizerte et de son arsenal Ferryville, Chantiers de Jeunesse, administrations et services divers ne pouvaient en faire partie sans du même coup compromettre la souveraineté française en Tunisie ; souveraineté liée à une politique de collaboration active avec les Allemands en guerre et depuis le 8 novembre 1942 fortement menacée et par les musulmans souriant à l’indépendance et par les Italiens ne renonçant pas à leurs visées expansionnistes.

Le recrutement des combattants de la Phalange africaine s’effectua donc surtout parmi les SOL et les militaires du P.P.F. Aux côtés de militaires de carrière et d’anciens combattants on trouve de jeunes employés et ouvriers, des étudiants et même des lycéens. Le fils d’un contrôleur civil côtoie le bibliothécaires en chef de la ville de Tunis ; un professeur de latin, le fils d’un général ; des instituteurs, un banquier, et un employé des contributions directes le propre fils du chef de la Légion des Combattants. Des pères de famille nombreuse partagent le sort de leurs enfants volontaires et des cadets le sort de leur frère aîné.

Ils sont tous ardents maréchalistes et l’appel de l’amiral Esteva (création d’une première Phalange, noyau de la future Légion Impériale) a une résonance patriotique indiscutable pour eux. Les éléments intellectuels quant à eux, sont pour la plupart d’anciens militants des partis ou ligues nationalistes : ils sont maurrassiens, Croix de feu, doriotistes, céliniens. Monarchistes ou fascistes, dès le 8 novembre 1942, ils souhaitaient, avec le capitaine Dupuis (désigné comme commandant de la première Phalange), bouter l’ennemi américain et l’ennemi anglais hors du territoire nord-africain. Les Anglo-Saxons sont devenus les alliés des Soviétiques et leur victoire verrait le retour de la démocratie, c’est-à-dire des Juifs, des francs-maçons, au plus grand bénéfice des communistes, seuls vainqueurs en dernière analyse. Et cela ils le refusent calmement, résolument. C’est pourquoi ils font le don de leur personne. Le Maréchal l’a fait pour la France en 1940. En ce début de l’année 1943 eux le font pour la France et l’Occident tout entier…

La Mission militaire a ses bureaux avenue de Paris, au cœur de la ville. La caserne de Forgemol dans la banlieue, à Franceville, sert de garnison à la Phalange africaine. Le camp d’entraînement des volontaires est à Bir el-Bey, charmante station sous les pins près de la résidence beylicale d’été d’Hamman-Lif et non loin du Chantier de Jeunesse reconstitué dans le même temps.

Le lieutenant-colonel Cristofini est blessé sérieusement à un œil par un éclat de grenade au cours d’un exercice de destruction d’un char en première ligne. Il est évacué sur un navire-hôpital en Sicile et sera rapatrié sur Guéret d’abord puis sur la Corse. Il est remplacé à la tête de la Mission par le commandant Curnier que supplée le Capitaine Eu.

Le capitaine Dupuis reçoit le commandement de la première Phalange. Il est ancien combattant de la Grande Guerre, il a participé à la libération de la Pologne en 1921, repris du service en 1939 et combattu vaillamment jusqu’à l’armistice.

Deux mois d’instruction intense les trois dernières semaines de janvier consacrées au recrutement, à l’équipement, à l’armement, aux installations. Culture physique, marches, exercices de tir alternent avec les manœuvres diverses de combat effectuées sous la direction de deux officiers allemands, de quatre sous-officiers et d’un interprète, tous combattants de Russie.

Les légionnaires cantonnent sous des tentes-marabout fournies par les Chantiers de Jeunesse, leurs voisins.
Ils disposent d’un terrain de manœuvre excellent délimité par un front de mer de deux kilomètres et d’autant en profondeur jusqu’aux contreforts du Bou Kornine et du Kanguet, superficie correspondant à peu près à celle du secteur du front qui leur sera imparti.

Ils apprennent à évoluer, se déplacer rapidement et efficacement. A gagner un endroit ou retraiter vers un autre sans se découvrir ni s’exposer. A creuser leur trou individuel suivant la nature du terrain et compte tenu de l’offensive présumée : artillerie, infanterie, aviation, chars. A désarmer un adversaire. A parer une attaque ou l’esquiver ; à contre-attaquer, riposter, à suppléer, à distraire, ruser, rechercher, couvrir etc.
Les méthodes et conseils de leurs instructeurs allemands se révèlent payantes. Les légionnaires acquièrent en très peu de temps l’automatisme et les réflexes du soldat en campagne, la connaissance et l’expérience des armes et de l’utilisation du terrain.

Une chaude ambiance issue de la fraternité des armes et sous le signe de la communauté d’idéal préside tout au long de ces deux mois d’instruction (veillées, chants, débats, saynètes, occupent les soirées des légionnaires) lesquels seront sanctionnés début avril par la visite d’inspection du général Weber, commandant la division à laquelle appartient la compagnie. Une manœuvre effectuée sous les tirs à balles réelles par les légionnaires emportera l’adhésion et les félicitations de l’officier général entouré des membres de son cabinet et accompagné du ministre Rahn a passé en revue les volontaires, félicité leurs officiers harangué les hommes. Ceux-ci devront faire honneur au serment qu’ils ont prêté à la suite de leur engagement solennel :

« Fidèle au maréchal Pétain et à son Gouvernement, je prête serment au führer Adolf Hitler, chef des armées allemandes et européennes.
Je m’engage à servir au sacrifice de ma vie pour la victoire commune de la France et des puissances de l’Axe. »

(La formule du serment a été reproduite sur chaque livret individuel, signée par chaque légionnaire et paraphée par le chef de la Mission française.)
Les phalangistes ne vont pas tarder à monter en ligne. En quoi consiste leur équipement, quel est leur armement ?
Ils portent l’uniforme français des fantassins : vareuse, pantalon « sarouel » avec chevillères, bourguignotte, brodequins. La Phalange africaine étant une pure création gouvernementale française, l’insigne de l’unité combattante choisi fut la francisque du Maréchal. Les phalangistes portèrent donc sur la poitrine, sur la poche droite de leur vêtements, un écusson de tissu bleu noir orné d’une francisque à double tranchant, de métal doré. (Dimensions hors tout, 70 x 80 mm.)
La veille de leur montée en ligne, les phalangistes furent équipés d’une capote allemande, d’un casque allemand, de brodequins allemands. Le casque était orné de la cocarde tricolore. La vareuse, la capote portaient sur le côté droit la francisque du Maréchal. Les officiers garderont en ligne leur même tenue française, avec la francisque.
Les phalangistes sont armés de fusils allemands les officiers portent au ceinturon leur revolver français.
A l’exception des cent-soixante fusils allemands et leurs quelque vingt mille cartouches dont sont pourvus les combattants de première ligne, l’armement et le train sont français.
Le « train des équipages » comprend, outre une douzaine de véhicules allant du tracteur à six roues à la cuisine roulante, vingt-six chevaux – de selle, de trait —, et mulets.
Les six sections de l’unité se partagent dix-huit mitrailleurs français, quatre mitrailleuses Hotchkiss. Son artillerie est riche de deux mortiers de 60 et de trois canons de 47, qu’alimenteront trois milliers d’obus. Les fantassins disposent enfin de deux mille grenades offensives et défensives. Le stock de fusées et fumigènes de toutes couleurs est appréciables : un bon millier.
Dans la journée du 8 avril 1943 le camp se vide de ses légionnaires à l’exception d’une section qui instruira les nouvelles recrues en dépôt à Forgemol. Par camions, tracteurs chenillés, motos et side-cars les volontaires sont acheminés vers le secteur du front où ils relèveront une unité allemande sur la brèche, elle, depuis juste cinq mois. Ils sont en face de Medjez el-Bab, le point chaud du front nord. Leur adversaire ? des Anglais, des Australiens, des Néo-Zélandais. L’Américain avec son aviation et ses chars n’est pas loin, à Pichon, au Goubellat.

Les phalangistes prennent position. Sur les éminences dominant au nord-est la ville de Medjez el-Bab à environ cinq kilomètres de distance, et le long de la Medjerda, fleuve important, le long duquel courent la voie de chemin de fer et une route à grande circulation.
La compagnie compte 160 combattants en contact avec l’ennemi. Elle est divisée en cinq sections dont une de commandement avec chacune un lieutenant à sa tête. Elles disposent de mitrailleuses et l’une d’elles d’un groupe de mortiers. Le train de combat est en retrait, à 5 km des positions, à la ferme Klioua.
Dès la relève des Allemands l’activité est intense. Les sections essuient des tirs d’artillerie le jour, elles comptent des blessés et un mort – le légionnaire Le Bloa – dans leurs rangs, ce qui ne les empêche point la nuit d’entreprendre des patrouilles entre les secteurs et faire des incursions dans les lignes ennemies. Quelques coups de main se révèlent fructueux : renseignements, armes abandonnées, repérage des positions ennemies destruction de mines. Huit jours durant les différentes sections subissent les tirs de harcèlement de l’ennemi et de violents bombardements par obus fumigènes. Le terrain est constamment labouré par ces obus mais les phalangistes ont creusé leurs abris et s’accrochent à leurs positions. Les liaisons restent bien établies, le contact permanent la symbiose franco-allemande des unités en ce point du front, parfaite.

Le 16 avril une patrouille composée de 8 hommes, des sergents-chefs Picot et Laurent de la 1ère section entre en contact vers la cote de Fguira Mermah avec une forte reconnaissance anglaise (plus de 50 hommes). La patrouille, divisée en deux demi-groupes, avec intervalle régulier, se heurte à des inconnus. Le sergent-chef Picot lance le mot d’ordre. En écho le mot de passe anglais. Picot a à peine le temps de crier à son fusil-mitrailleur « Tire ce sont les Anglais » qu’il tombe fusillé à bout portant par une mitraillette. Le sergent-chef Laurent bondit en hurlant au milieu de l’ennemi faisant cracher son fusil-mitrailleur. Des silhouettes s’effondrent, d’autres fuient ou se terrent. Tandis que son groupe arrose de grenades les blés ou les arbustes formant écran devant lui, le reste du groupe Picot sous le commandement du caporal Périnne se replie en combattant vers la compagnie allemande la plus proche. Celle-ci apporte immédiatement son secours par un groupe et, en compagnie du caporal Périnne, retourne sur le terrain de combat. Parvenus au terrain de combat ils trouveront 7 morts et 3 blessés ennemis et un matériel de combat important : 1 mitrailleuse, 5 mitraillettes, 2 pistolets, des lance-flammes, des appareils spéciaux pour l’enlèvement des mines. Butin et tableau de chasse du groupe du sergent-chef Laurent. Les Allemands décident d’évacuer les trois blessés anglais et le matériel abandonné. Le corps du sergent-chef Picot (trouvé décapité) sera enlevé plus tard.

Trois jours après, sur la route menant à Bordj Frendj, au PC du régiment, les légionnaires de la 1ère section en tenue de campagne, en chandail avec courroies de musette et de bidon, chantent l’hymne de leur « armée».

En présence du colonel du Jonchay, du commandant Curnier et du colonel Audorf, commandant le 754e régiment de Panzer Grenadier, ils reçoivent des mains du général Weber, Kommandeur de la 334e division d’infanterie, les Croix de Fer récompensant leur acte de bravoure. Les services des actualités opèrent. Allocution du général célébrant la fraternité d’armes franco-allemande sous le ciel africain, (pour la petite histoire disons que le général Weber, qui s'attendait à passer le ruban dans une boutonnière, faute d’épingle, attacha les rubans à la courroie symbolique du bidon ! O bienheureuse armée française !…)
Le 20 avril un groupe franc est constitué au sein de la compagnie. Sous la conduite de l’aspirant Goussaux, gardien du fanion de la Phalange africaine, l’assaut est donné à une ferme puissamment tenue par les Anglais. La position est enlevée et occupée par la 3e section qui nettoie le terrain une journée et une nuit durant. Des canons anti-tanks allemands sont placés en renfort entre les différents secteurs tenus par les phalangistes car on s’attend à une offensive anglaise. Une patrouille retrouve le corps du sergent-chef Picot, dépouillé cette fois de ses chaussures, à proximité des corps des 7 Anglais mitraillés par le sergent-chef Laurent et ses hommes.

Les bombardements se font de plus en plus violents. Les positions phalangistes sont copieusement arrosées. Puis dans la nuit du 22 avril, à 21 heures, le ciel s’enflamme : les batteries ennemies tirent à une cadence accélérée sur le 3e bataillon allemand tenant le djebel Ahmera qui surplombe la Medjerda.
A 3 heures du matin l’offensive anglaise se déchaîne contre ce 3e bataillon et une heure plus tard contre les positions phalangistes. La mêlée devient générale dans la fumée des obus fumigènes. Les mitrailleuses des sections recevant le choc des Anglais tirent sans arrêt. Des groupes entiers sont fauchés, les hommes tombent leurs armes à la main. D’autres s’égarent en portant secours à des camarades encerclés. Certains parviennent à se dégager et refluent vers des secteurs moins exposés. La 3e section est enveloppée de brouillard et se fait massacrer non sans tirer jusqu’à la fin. Alain Graignic – le fils de l’ancien contrôleur civil —tire sans discontinuer avec son FM sur les Anglais qui progressent au milieu des fumigènes. Soudain il lâche son arme, hurle le nom de sa mère et s’écroule. Son chargeur, Georges Goloubmetz ramasse le FM et tire, tire tant qu’il peut. L’arme s’enraye Deux tommies baïonnette au canon bondissent à ses côtés, le font prisonnier. Avec lui, 60 hommes sont morts ou ont été faits prisonniers au cours de ces douze heures de combat.

La section de commandement et le reste du groupe de reconnaissance, en marche vers la cote 133, voient arriver sur eux des chars. Ce sont les Américains qui appuient l’offensive anglaise en direction des côtes 104 et 130 qui seront occupés aussitôt. Des rescapés des compagnies allemandes tenant le fleuve Medjerda rendent compte de la progression anglaise et de l’investissement des positions dans ce secteur à 18 heures.

La section de réserve du lieutenant Clergeot ayant fait route depuis la Medjerda, s’intègre à la section de commandement du capitaine Dupuis et prend position sur la côte 119. A 20 heures, les 70 survivants de la bataille se replient non sans que l’aspirant Vintmil, professeur de latin dans le civil, anéantisse avec sa mitrailleuse les servants d’un canon-revolver tirant non loin de là. Il venge ainsi la mort de son jeune frère, un lycéen de 16 ans.
Depuis l’entrée dans la bataille des chars américains, le train de combat a reçu l’ordre du commandant de bataillon de se replier sur Tébourba. Le rassemblement des phalangistes s’effectue au P.C. du bataillon, L’effectif de la compagnie comprend un peu plus de 100 hommes dont de nombreux blessés.
L’offensive anglo-américaine est stoppée. Des canons multitubes allemands (réplique des fameuses « orgues de Staline ») ont pris position sur toutes les crêtes et le front se « stabilise ». Pour quelques jours seulement. La Phalange africaine panse ses blessures, se ravitaille, se ré-équipe, reprend ses activités : patrouilles, reconnaissances, liaisons. La petite unité enregistre à nouveau des morts mais elle inscrit à son actif de nouveaux succès, harcelant les positions fluides de l’ennemi plus ou moins isolé de ses arrières.

Le 27 avril 1943, à 3 heures du matin, la relève de la compagnie a lieu, La première Phalange passe en réserve de bataillon. Elle cantonne à 3 kms de là à la ferme Mahfoura. A midi elle essuie un double bombardement aérien, vers 17 heures un bombardement d’artillerie, d’intensité égale à celle du 22 avril. Le légionnaire Dominique Berg, Croix de Fer, infirmier, sauve d’une mort certaine la femme du fermier qui a la cuisse ouverte profondément par un éclat. C’est à nouveau l’offensive ennemie. Les unités allemandes sont encerclées. Le commandant du bataillon ordonne au capitaine Dupuis de faire route sur Massicaut. Il est accordé à ses hommes dix jours de repos. A l’entrée nord de cette ville, le colonel du Jonchay, qui n’a pas cessé depuis la montée en ligne des volontaires, le 8 avril, de rendre visite aux combattants, vient communiquer aux phalangistes remerciements et félicitations de l’amiral Esteva, résident général.
Sur le front des troupes, le chef de bataillon Burgmeister remet au nom du Führer la Croix de Fer de 2ème classe au capitaine Dupuis.
La compagnie se déplacera de nouvelles fois, se repliant toujours plus au nord et à l’est installant ses quartiers dans des fermes, ou des ravins, des bois ou dans les champs, essuyant des bombardements de l’aviation anglo-américaine. Des équipes de travailleurs juifs, italiens, musulmans, français aussi – des Chantiers de Jeunesse – creusent des retranchements sur les derniers contreforts devant Tunis. Les obus pleuvent.

Le 1er mai 1943, les phalangistes sont cantonnés à la ferme Fontaine au nord de Massicault. Les blessés et les malades sont évacués sur le dépôt Faidherbe à Tunis. L’effective est de 89 hommes dont 64 en ligne. Les munitions françaises surtout des mitrailleuses Hotchkiss font défaut Les aspirants Goussaux et Vintmil sont nommés sous-lieutenants et chefs de section. Le capitaine Peltier, chef adjoint de la Mission Militaire rend compte de la mission à Vichy du commandant Curnier. Ce dernier a reçu du président Laval confirmation de l’intégration de la Phalange africaine à la Légion Tricolore.
Le 6 mai l’armée allemande se replie sur Tunis. La première Phalange quitte la ferme Fontaine pour gagner Tunis vers 20 heures non sans avoir subi un violent bombardement à La Mornaghia.
Le 7 mai le capitaine Dupuis reçoit de l’état major allemand l’ordre de démobiliser la compagnie. Les hommes ne seront pas évacués sur l’Italie le rembarquement n’étant plus possible. L’amiral Esteva lui, a été rapatrié (contre son gré) sur Paris.
Le lieutenant Charbonneau de la Mission Militaire entreprend dans la nuit une démarche auprès de Mgr Gounot, archevêque de Carthage, pour mettre sous sa protection les quelque cent vingt phalangistes démobilisés. Le primat d’Afrique lui accorde ce qui est demandé. Les phalangistes seront rassemblés à Carthage dans la propriété de l’archevêché. Ils n’auront pas d’armes. Leurs familles pourront les accompagner. On peut espérer pour eux un sort identique à celui des troupes françaises de Syrie demeurées loyalistes et rapatriées sur Marseille en 1941…

EPILOGUE

La centaine de phalangistes réfugiés à Carthage et partageant leur refuge avec des Anglais furent arrêtés par les autorités militaires giraudistes – au grand ébahissement des Anglais qui « auraient bien voulu les garder » et, passant de prison en prison, incarcérés finalement à Alger où ils retrouvaient des éléments portés disparus lors de l’attaque du 23 avril. Là, l’épuration décidée par Charles de Gaulle quelques mois plus tard, les frappa dans les personnes de leur chef le colonel Cristofini (arrêté en Corse), fusillé sur une civière : il s’était suicidé au moment de son départ pour le supplice, et de leurs officiers condamnés à la peine de mort – avec un adjudant-chef, un sergent-chef et un légionnaire. Ces derniers virent leur peine commuée en celle des travaux forcés à perpétuité et furent transférés au bagne de Lambèse dans le sud constantinois où la plupart des phalangistes purgeaient de lourdes peines de travaux forcés.
De tous jeunes phalangistes, après une brève incarcération, furent versés dans des régiments de corps d’armée en campagne en Italie, en Provence ou en Alsace.
Enfin une minorité de leurs camarades – une vingtaine, une trentaine ? – ayant choisi la clandestinité ou l’anonymat, échapperont à toute répression.
Mais du côté « loyaliste », un autre jeune phalangiste, Folacier, ayant réussi à quitter Tunis par avion au milieu des Anglais et des Américains, rejoignait la Métropole et, après un séjour à Montargis, dépôt de la L.V.F., montait sur le front russe sous l’uniforme à tête de mort. Accompagné de son jeune frère, âgé à peine de 15 ans, il disparaissait sur l’Oder…
En 1953, soit dix années après leur engagement dans la dernière unité française gardienne de l’Empire, les derniers phalangistes incarcérés sortaient du bagne de Lambèse.

René PELLEGRIN.
mort de rir gri

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Message  Laurent "Pink panth 16/3/2011, 16:41

"Arrival of admiral Jean Pierre Esteva in Vichy with l-r : captains Schlisler and Dupuis, commandant Curnier, a navy officer, the lieutenent colonel Sarton du Jonchay, behind Esteva there is Jean Jardel, second world war..."


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