Commissaires politiques nazis

Bonjour,

J'ai lu ceci dans un article:
"La méfiance du Führer s'est d'ailleurs manifestée dés décembre 1943, avec la mise en place des officiers chargés de l'endoctrinement et du contrôle idéologique, qui sont de véritables commissaires politiques"
Klaus Jürgen Müller

Avez-vous de choses à raconter sur ces commissaires politiques? Particulièrement, s'agit-il plutôt de formateurs ou de contrôleurs? Etaient-ils là là à épier celui qui commettrait un crime politique afin de l'embastiller ou était-il des inspecteurs réorientant ce qui pouvait se passer ici où là?

supertomate a écrit:Bonjour,

J'ai lu ceci dans un article:
"La méfiance du Führer s'est d'ailleurs manifestée dés décembre 1943, avec la mise en place des officiers chargés de l'endoctrinement et du contrôle idéologique, qui sont de véritables commissaires politiques"
Klaus Jürgen Müller

Avez-vous de choses à raconter sur ces commissaires politiques? Particulièrement, s'agit-il plutôt de formateurs ou de contrôleurs? Etaient-ils là là à épier celui qui commettrait un crime politique afin de l'embastiller ou était-il des inspecteurs réorientant ce qui pouvait se passer ici où là?

Salut Supertomate;

"Ironically, the attempt to kill Hitler and end the war in July 1944 had the opposite of its intended effect. Not only did the plot fail, it nullified any possibility that the one institution in Nazi Germany that could have toppled Hitler — the army — would do so. Embarrassment that high-ranking members of the military had broken their oath of allegiance to Hitler helped reinvigorate nationalist fervor among substantial segments of officers as well as the rank and file. The army was “Nazified.” The standard military salute was replaced by the raised-arm “Hitler salute,” mandated for use throughout the military, and all officers were designated “National Socialist Leadership Officers”; they became, in effect, political commissars as well as military commanders, spreading the party line and aggressively indoctrinating soldiers with Nazi Party propaganda".

Voir Ian Kershaw : The End

Eddy

Bonjour !

Voici un extrait de mon mémoire de Master 2 sur le XXV. Armee-Korps en Bretagne.

Pour maintenir intact le tissu de la cohésion et la loyauté dans la troupe, la hiérarchie du IIIe Reich a usé de préceptes et d’initiatives diverses. Le but recherché étant véritablement d’éduquer et de socialiser le soldat ainsi que d’imprégner l’idéologie nationale-socialiste dans toutes les strates de l’armée.Anne Duménil a écrit que les tâches d’éducation morale qui incombait aux officiers de la Kaisersheer s’inscrivaient dans un processus tendant à inculquer au soldat le patriotisme, le sens de l’honneur et de la dignité, le courage et la maîtrise de soi .
Comme l’explique Omer Bartov, le rôle des officiers était primordial pour maintenir la cohésion au sein des différentes unités. Von Brauchitsch soulignait que leur conduite avait un effet immédiat sur les soldats, et soulignait dans un document annexe les domaines importants dans le « maintien intérieur » et l’apparence des officiers. Les commandants, affirmait-il, devaient donner l’exemple à leurs hommes en se montrant toujours prêts à faire leur devoir et en manifestant leur sens des responsabilités ; ils devaient également se soucier des affaires quotidiennes de leurs subordonnés ; ils étaient tenus de faire respecter une discipline sévère mais juste ; ils n’avaient pas le droit de s’enivrer et devaient veiller à ce que leur « maintien extérieur » et leur uniforme soient impeccables, même aux moments les plus difficiles de la bataille .
Mark Mazower insiste aussi sur le fait que la surveillance qu’exerçaient les officiers subalternes allemands sur leurs soldats avait un rôle psychologique bien plus important que chez les Anglo-saxons. En effet, tout supérieur avait le devoir de contrôler le sentiment d’isolement des soldats que l’armée savait dangereux pour le moral. La consigne récurrente était de « ne pas laisser le soldat seul . » Il n’en reste pas moins que les officiers avaient un pouvoir de contrôle assez largement étendu sur leurs hommes. Ils pouvaient ainsi avoir l’œil sur les journaux intimes de leurs hommes, ce qui implique de surveiller leurs pensées et leurs sentiments de façon vigilante. Les hommes devaient s’avérer être « transparents » afin de pouvoir réagir contre toute tendance de retrait ou de réserve, étant donné que ces attitudes étaient des indices sûrs de troubles émotionnels, de « crise » et de défaitisme. D’autre part, l’officier était censé multiplier les adeptes du régime, susciter chez eux l’enthousiasme pour les projets du Reich et leur imposer une soumission aveugle .
Sauf, comme explique Pierre Ayçoberry, si les troupes n’ont pas été totalement endoctrinées, c’est à cause des oppositions entre les divers services d’action psychologique. Sous l’égide de Keitel, l’un des plus fidèles lieutenants du Führer, l’OKW invitait les officiers à se rapprocher de leurs hommes afin de développer en eux le sentiment national-socialiste. A l’inverse l’OKH dirigé par Halder et Zeitzler et beaucoup plus traditionaliste, s’évertuait à se référer à des valeurs anciennes, comme le comportement chevaleresque avec les populations occupées, non sans un double langage d’ailleurs .
Cependant, à la fin de l’année 1943, le pouvoir nazi décide de s’ingérer davantage dans les affaires militaires en déléguant des commissaires politiques (à l’instar des Politruk de l’Armée Soviétique) au sein des unités : les NSFO (National-Sozialistische Führungs Offiziere) soit « Officiers de commandement nationaux-socialistes . » Ils dépendent du Parti et donc de Martin Bormann. Leur rôle est d’entretenir le moral des troupes tout en servant de délateurs au parti. Le rapport d’activité du XXV. AK fait bel et bien état de cette nouvelle situation pour les mois de février et mars 1944. On y lit que « le Leutnant Nitsch et l’Oberleutnant Klappenbach sont détachés au sein de l’état-major du XXV. AK en qualité d’officiers politiques nazi . »
On assistait ainsi à l’effet inverse de ce qui se passait dans les rangs soviétiques, puisque le maréchal Georgi Joukov avait obtenu de Staline que les Politruk n’aient plus la mainmise sur les unités dont ils bénéficiaient au début de la guerre. (Mais les Politruk avaient des pouvoirs plus étendus que les Napol, car ils participaient aux décisions opérationnelles et ce, jusqu'à fin 1942). A la grande satisfaction des officiers et des soldats . Von Choltitz a d’ailleurs qualifié la création des Napol de « tentative tardive et grotesque. » En principe, le Parti Nazi les désigne, mais il arrive que les chefs d’unité disposent d’une certaine largesse. En effet, comme l’explique le General der Panzertruppe von Senger und Etterlin, il y avait « les mouchards redoutés et les braves types de bonne foi . » Et souvent, afin de favoriser les nominations de « braves types », les commandants de corps d’armée ou de division prennent soin de choisir des personnes qui leur sont subordonnés. C’est le cas pour les dénommés Nitsch et Klappenbach qui proviennent respectivement de la 343. Infanterie-Division et de l’Ost-Radfahrsgruppe 285 .

Cordialement

Merci bien pour ces réponses.

Si je pige bien, jusque fin 1943 les officiers classiques ont aussi un rôle politique. Ensuite il y a, en plus, des officiers dont c'est spécifiquement le rôle et là on pense à l'armée rouge.

Un détail, mais je ne comprends pas la phrase suivante:

Et souvent, afin de favoriser les nominations de « braves types », les commandants de corps d’armée ou de division prennent soin de choisir des personnes qui leur sont subordonnés.

Ces officiers politiques étaient donc choisis par les commandants de corps d'armée ou de division; pouvait-ils ne pas leur être subordonné?

Mon anglais n'étant pas suffisant, j'avais demandé une traduction de l'extrait qu'a proposé Eddy. Elle est arrivé et vaut ce qu'elle vaut:

Ironiquement, l'attentat de juillet 1944 contre Hitler est allé à l'encontre de ses objectifs. Non seulement la conjuration a échoué, mais l'échec a en plus anéanti toute possibilité pour que la seule instistuiton d'Allemagne nazie capable de renverser Hitler -l'armée- le fasse. L'embarras [la gêne, la confusion] crée par le fait que des membres haut-placés de l'armée aient rompu leur serment d'allégeance à Hitler a contribué à raviver la ferveur nationaliste chez une quantité non négligeable d'officiers et d'hommes de troupes. L'armée s'est retrouvée "nazifiée". Le salut militaire usuel a été remplacé par le salut hitlérien, qui a alors été rendu obligatoire dans toute l'armée [je ne suis pas archi-sûre du "rendu obligatoire". Mais c'est ce qui colle le mieux avec "mandated"], et tous les officiers ont été nommés "Officiers Dirigeants [directeurs?] National Socialistes". Ils sont en effet devenus tant commissaires politiques que commandants militaires, diffusant la ligne du parti et endoctrinant avec aggressivité les soldats avec la propagande du parti nazi.

Voir Ian Kershaw : The End